Ce matin, j’ai démontré par l’exemple les conséquences de la réponse ministérielle CIOT et l’absolue nécessité de matérialiser le partage de la succession au décès du premier des époux.
En effet, pour mémoire, et comme rappeler dans cet article « Réponse ministérielle CIOT : Les conséquences fiscales de l’exonération des contrats d’assurance vie du conjoint« , au terme de la réponse ministérielle CIOT :

Le contrat d’assurance vie souscrit par un époux marié sous le régime de la communauté est considéré comme un bien commun. Le contrat souscrit par le survivant des époux au décès du premier des époux devra donc faire partie de l’actif de succession pour moitié. Civilement, les héritiers, y compris les enfants auront un droit de propriété sur ledit contrat. Ce droit de propriété suivra l’option du conjoint dans la succession et sera à défaut de donation entre époux :

– 100% en nue propriété de la moitié du contrat souscrit par le survivant des époux ;

– 3/4 en pleine propriété de la moitié du contrat souscrit par le survivant des époux.

– Fiscalement, c’est à dire pour le paiement des droits de succession, la réponse ministérielle CIOT considère « au plan fiscal que la valeur de rachat d’un contrat d’assurance-vie souscrit avec des fonds communs et non dénoué à la date du décès de l’époux bénéficiaire de ce contrat, ne soit pas intégrée à l’actif de la communauté conjugale lors de sa liquidation, et ne constitue donc pas un élément de l’actif successoral pour le calcul des droits de mutation dus par les héritiers de l’époux prédécédé ». Le contrat d’assurance vie souscrit par le conjoint survivant, bien que civilement attribué aux héritiers, ne supportera pas les droits de succession. 

 
 

Afin de bénéficier pleinement de cette exonération du contrat du conjoint survivant, il est indispensable de matérialiser le droit de propriété des héritiers sur le contrat d’assurance vie du conjoint survivant.

La matérialisation du droit de propriété des héritiers est fondamentale et permettra une très forte économie d’impôt (cf notre exemple chiffré « Assurance vie : Pourquoi la réponse ministérielle CIOT n’est pas une bonne nouvelle pour les assureurs ?« ).
En effet, à défaut de matérialiser le droit de propriété des enfants (c’est à dire si le conjoint conserve son contrat d’assurance vie en l’état), les capitaux qui appartiennent pourtant déjà aux héritiers (du fait du règlement civil de succession) se trouveront soumis à l’impôt du fait du dénouement du contrat d’assurance vie (et cela en application des articles 757 B du CGI ou 990 I). 
Pour éviter cette situation désastreuse synonyme d’une imposition non justifiée, il est préconisé de procéder à un partage de la succession et au rachat de la moitié de la valeur de rachat dudit contrat d’assurance vie souscrit par le conjoint.
Le produit du rachat permettra de matérialiser l’héritage des enfants. Par exemple dans le cas d’une succession dévolue 100% en usufruit au profit du conjoint et 100% en nue propriété pour les enfants, le produit du rachat sera démembré et sera réparti comme suit :

– 100% en usufruit pour le conjoint survivant ;

– 100% en nue propriété pour les enfants.

Ensemble, le couple usufruitier et nus propriétaires décidera de l’usage des capitaux (cf »Comment placer les capitaux entre usufruit et nue propriété ? » et « Prix de vente démembré (usufruit / nue propriété) : Comment réussir le placement des fonds ?« ) entre :

– Démembrement de propriété et remploi sur un actif démembré (tel un contrat de capitalisation ou un immeuble par exemple) ;

– Quasi-usufruit, c’est à dire, laisser la pleine disposition des capitaux au conjoint qui en disposera comme bon lui semble à charge de « rembourser » les nus propriétaires sur sa succession (cf »Usufruit, Nue propriété, Quasi-usufruit : Définition, droits et obligations.). De manière pragmatique, les capitaux sont laissés à l’usufruitier qui en dispose librement et en fait ce qu’il veut et peut même le dépenser, et les nus propriétaires disposent d’une créance sur son patrimoine. Cette créance ne pourra être exercée qu’au décès de l’usufruitier ;

– La partage entre usufruitier et nus propriétaires du capital en fonction du barème de l’article 669 du CGI.

 
 

Le quasi-usufruitier, une solution naturellement retenue afin de ne pas bouleverser l’environnement financier du conjoint survivant.

De manière assez logique et raisonnablement respectueuse du conjoint survivant qui concédera avec difficulté de partager SON épargne avec ses enfants alors qu’il est toujours vivant, la solution du quasi-usufruit sera l’option privilégiée par la grande majorité des héritiers.
En l’espèce, le quasi-usufruit permettra au conjoint survivant de conserver la pleine jouissance des capitaux issus de son contrat d’assurance vie, il pourra l’utiliser librement sans rendre de compte aux héritiers. Bref, il disposera pleinement de son épargne constituée avec son époux.
Le raisonnement tient parfaitement pour l’assurance vie, mais également pour l’ensemble des liquidités bancaires telles que les PEL ou autres livret A (cf »Succession : Que deviennent argent et placements du conjoint décédé et du couple ?« ).
 
 

Mais alors, plus de problème avec le quasi-usufruit. Pourquoi ne pas laisser les capitaux dans le contrat d’assurance vie du conjoint. Le rachat n’est plus indispensable ?!

Et oui, nous ne manquerons pas d’entendre cette remarque dans la bouche de nos amis les assureurs, qui ont toujours à cœur de défendre l’intérêt des épargnants mais qui seraient tristes de voir fondre le montant de leurs encours.
En l’état, et comme nous vous l’avions détaillé dans cet article « Comment placer les capitaux entre usufruit et nue propriété ?« , il est fiscalement risqué d’investir un capital détenu en quasi-usufruit dans un nouveau contrat d’assurance vie en laissant la clause bénéficiaire à titre gratuit.
 
Il peut sembler tentant pour de nombreux quasi-usufruitiers d’investir le bénéfice d’une clause bénéficiaire démembrée au terme de laquelle ils disposeraient un quasi-usufruit, c’est-à-dire une libre disposition des capitaux, dans la souscription d’un contrat d’assurance-vie.
Cette opération est à proscrire et pourrait être à l’origine d’une requalification fiscale. En effet, le nu propriétaire se trouverait être à la fois bénéficiaire du contrat d’assurance-vie à titre gratuit et de la créance de restitution à titre onéreux.
L’administration fiscale pourrait alors invoquer le caractère abusif de l’opération. Explication :
Le quasi-usufruitier jouit de la pleine propriété sur la somme soumise au démembrement. Il peut, en théorie, librement disposer de ce capital comme le ferait un plein propriétaire.
Au décès du quasi-usufruitier, ce capital ne sera pas soumis aux droits de succession en vertu de la créance de restitution qui permettra une transmission nette de droits de succession au nu propriétaire.
En investissant le capital issu d’une clause bénéficiaire démembrée dans un nouveau contrat d’assurance-vie, le souscripteur du contrat, également quasi-usufruitier du capital, extrait deux fois les capitaux soumis au démembrement de propriété de la masse successorale :

Au décès du quasi-usufruitier souscripteur du contrat d’assurance-vie, le bénéficiaire désigné recevrait le capital « hors succession » en application de l’article L132-12 du code des assurances.

– En application de la créance de restitution, le nu propriétaire se verrait attribuer le capital démembré via un passif de succession. Devant l’incapacité d’imputer la valeur de la créance de restitution sur le contrat d’assurance-vie dénoué et transmis au bénéficiaire désigné, la créance du nu propriétaire trouverait à s’appliquer sur le reste du patrimoine de l’usufruitier.

 
Les capitaux démembrés seront transmis deux fois « en dehors de l’actif de succession » :

    • Lors de l’application de la créance de restitution ;
    • Lors de la transmission « hors succession » des capitaux investis dans un contrat d’assurance-vie.

Ce montage est contestable et pourrait fait l’objet d’une requalification fiscale au titre de l’abus de droit surtout dans l’hypothèse courante le nu propriétaire et le bénéficiaire du contrat d’assurance-vie est la même personne. 
 
 

La clause bénéficiaire à titre onéreux : Une solution intéressante pour matérialiser le droit de propriété démembré des héritiers et conserver le contrat d’assurance vie.

Ainsi, dans le parfait respect de la réponse ministérielle CIOT qui aboutit à une double dévolution successorale (civile et fiscale), il pourrait être habile, dans le cadre d’un démembrement de propriété issu de l’option 100% en usufruit :

– De matérialiser le droit de propriété des héritiers par un quasi-usufruit. Le conjoint survivant serait alors quasi-usufruitier des capitaux (y compris de la moitié de la valeur de rachat du contrat d’assurance vie faisant partie de l’actif de succession) ;

De laisser intact le contrat d’assurance vie du conjoint survivant (= ne pas faire de rachat) ; 

Modifier la clause bénéficiaire du contrat d’assurance vie pour lui préférer une clause bénéficiaire à titre onéreux (et non à titre gratuit) en remboursement de la créance de restitution née du quasi-usufruit; En effet, comme je vous l’expliquais précédemment, le quasi-usufruit, c’est laisser la pleine disposition des capitaux à l’usufruitier qui en dispose librement et sans rendre de compte, mais aussi l’enregistrement d’une créance dite de restitution qui permettra aux nus propriétaire d’exercer leurs droits au décès de l’usufruitier. Au décès du quasi-usufruitier, les nus propriétaires, prélèvement hors droit de succession et avant partage et dévolution successorale, la créance afin d’être rétablis dans leurs droits de propriété.

Le remboursement de cette créance de restitution pourrait être envisagé dans la rédaction de la clause bénéficiaire du contrat d’assurance vie souscrit par le survivant des époux. Cette clause bénéficiaire ne serait alors plus à titre gratuit mais à titre onéreux, au titre du remboursement de la créance de restitution.

La transmission d’un capital via la clause bénéficiaire à titre onéreux n’est pas génératrice de l’imposition des articles 990 i ou 757 B du CGI. La transmission à titre onéreux n’ayant vocation qu’à éteindre une dette déductible, elle n’est pas imposable. La mise en place d’une clause bénéficiaire à titre onéreux pour le remboursement de la créance de restitution née du quasi-usufruit n’exclut pas la rédaction (non indispensable) d’une convention de quasi-usufruit dont la finalité est de faire reconnaître l’existence même de la créance.

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