Il est de coutume de comparer le rendement de l’épargne avec le taux d’inflation pour déterminer si le rendement obtenu est satisfaisant ou non ; Traditionnellement, lorsque le rendement atteint est inférieur à l’inflation, on se désole d’une perte de pouvoir d’achat alors que l’on se satisfera d’un rendement supérieur à l’inflation.
Ce raisonnement traditionnel me semble insuffisant car il s’agit d’une enrichissement absolu alors même que la notion d’enrichissement doit être appréciée en relatif.
Prenons un exemple pour bien comprendre cette insuffisance.
Imaginons une entreprise X.
Cette entreprise a 25% de part de marché ; Le marché affiche une croissance annuelle de 8% par année ; L’entreprise affiche une croissance de son chiffre d’affaire de 3% par année ;
Le taux de croissance économique du pays est de 4% et une inflation de 1%
Dans l’absolu, avec une croissance du chiffre d’affaires de 3% alors que l’inflation est à 1%, l’entreprise X peut considérer être créatrice de valeur à hauteur de 2% par année. Dans l’absolu, l’entreprise crée de la richesse pour ses actionnaires.
En relatif, non seulement l’entreprise est en réalité en train de perdre des parts de marché dans son secteur d’activité (car la croissance de l’entreprise est inférieure à la croissance du secteur), mais avec une croissance inférieure à la croissance du pays, elle est victime d’un déclassement économique qui pourrait la porter au déclin. En réalité, l’entreprise détruit de la valeur pour ses actionnaires.
Quel rendement minimum de votre épargne pour ne pas vous appauvrir.
Dans le monde de l’investissement et de l’épargne, le raisonnement que nous venons de vous proposer pour une entreprise est exactement le même.
Dans l’absolu, l’épargnant qui obtient un taux de rendement de son épargne au moins équivalent à l’inflation peut considérer à juste titre maintenir la valeur de son épargne et peut être même la valoriser ;
En relatif, celui qui se contente de valoriser son épargne au rythme de l’inflation s’appauvrit face à une économie en croissance qui crée davantage de valeur.
Ainsi, au niveau national, le rendement minimum de l’épargne pour maintenir sa valeur relative pourrait être celui du taux de croissance du PIB nominal (c’est à dire taux de croissance du PIB réel + inflation).
La question de l’inflation est délicate puisqu’elle n’intègre pas la hausse du prix des actifs tels que les actions ou l’immobilier. L’indicateur parfait sera un PIB nominal + inflation des actifs. Mais, faute de mieux, faisons avec les indicateurs à notre disposition.
Voici le graphique du taux de croissance du PIB nominal de la France entre 2000 et 2022 (prévision) qui doit vous permettre de comprendre pourquoi vous ne pouvez pas vous suffire d’un objectif proche de l’inflation.
En 2021, il faudrait donc un rendement minimum de 5.10% pour maintenir la valeur relative de votre patrimoine.

Voici ce graphique traduit en tableau. Vous pouvez y lire le rendement minimum de votre patrimoine depuis 20 ans pour maintenir la valeur relative de votre patrimoine :
Année | Taux de croissance du PIB nominal = Taux de rendement minimum de votre patrimoine pour maintenir la valeur de votre patrimoine. |
2000 | 5,69% |
2001 | 4,05% |
2002 | 3,18% |
2003 | 2,73% |
2004 | 4,27% |
2005 | 3,67% |
2006 | 4,85% |
2007 | 5,03% |
2008 | 2,49% |
2009 | -2,72% |
2010 | 2,93% |
2011 | 3,20% |
2012 | 1,55% |
2013 | 1,39% |
2014 | 1,57% |
2015 | 2,18% |
2016 | 1,55% |
2017 | 2,96% |
2018 | 2,78% |
2019 | 2,73% |
2020 | -6,09% |
2021 | 5,13% |
Cela correspond à un taux actuariel sur les 20 dernières années de 2.47%. Il s’agit bien évidemment d’un taux de rendement théorique net de frais et d’impôt.
En 2022, les prévisions de croissance économique et d’inflation permettent d’estimer ce taux de rendement minimum à 4.90%.
En 2020, le rendement moyen du fonds euros des contrats d’assurance vie a été de 1.28%.
Ce taux de rendement minimum de l’épargne pour espérer maintenir sa valeur relative est à comparer au rendement du fonds euros du contrat d’assurance-vie, support classiquement retenu par les épargnants pour stocker leur épargne.
Le dernier rapport de l’ACPR estime ce taux de rendement moyen du fonds euros à 1.28% en 2020, contre 1.46% en 2019. (cf. « Revalorisation 2020 des contrats d’assurance-vie et de capitalisation – engagements à dominante épargne et retraite individuelle« ) ;
Certains annonce 1% pour 2021.
Pour autant, depuis 2000, le rendement du fonds euros du contrat d’assurance-vie n’a pas à rougir face au taux de croissance du PIB nominal :

Depuis 15 ans, la croissance faible et la tendance déflationniste ont donné raison aux épargnants en fonds euros.
Pour autant, les performances futures du fonds euros semblent médiocres au regard du niveau excessivement faible des taux d’intérêt.
Ainsi, l’épargnant qui souhaite utiliser le fonds euros du contrat d’assurance-vie pour valoriser son patrimoine à long terme est celui qui n’est pas optimiste quant à la capacité de l’économie à croître dans les prochaines années.
L’épargnant pessimiste qui croit que la croissance + inflation vont rester très faibles dans les prochaines années doit pouvoir continuer d’épargner sur le fonds euros.
A contrario, l’épargnant optimiste ou celui qui croît dans un scénario inflationniste doit épargner différemment et investir dans l’économie s’il ne veut pas subir une baisse de la valeur relative de son patrimoine.
L’investissement immobilier et l’investissement à long terme dans le capital des entreprises via les actions cotées ou non cotées seront alors des alternatives efficaces (cf. « Pourquoi vous ne devriez pas avoir autant d’épargne. »)
A suivre.
J’aime beaucoup cette analyse.
Mais ne serait-il pas plus pertinent de considérer le PIB / habitant ?
Il représente ‘l’enrichissement moyen’, corrigé de la croissance de la population.
L’impact en 2020 est négligeable, mais un peu plus marqué dans les années 90-2000 (~0.5% de croissance pop.)
Je suis d’accord avec votre raisonnement, mais attention au mots utilisés, car un CA d’une société ne donne en rien la richesse produite. Il suffit de mettre ça marge à 0 et vous verrez votre CA s’envoler au dessus de votre marché sans pour au tant créer de la richesse pour les actionnaires et ça sera même le contraire. Prenez plutôt l’EBE ou le RCAI pour vos calculs.
😉 Nous sommes d’accord.
Comme on le voit sur le graphique, les fonds euros ont été rentables sur le long terme avec l’avantage d’une faible volatilité. En plus ils bénéficient d’une fiscalité avantageuse. Pourquoi faut-il tirer sur le baudet ?
Parce que les rendements ont atteint de tels niveaux bas, que l’avenir ne permettra probablement pas un tel miracle …Sauf si nous restons en déflation/récession pour les 15 prochaines années.
Nous ne savons rien des 15 prochaines années. Si les taux d’intérêt remontent, le taux de distribution des fonds euros euros devrait suivre en principe. Par ailleurs le fait que les bourses demeurent agitées n’est pas à exclure…
les fonds en euro ont rarement été rentables : les taux étaient presque toujours inférieurs ou égaux à l’inflation, et cela depuis 40ans.
ils ont été supérieurs à l’inflation pendant une très courte période autour des années 90.
l’intérêt de l’analyse de Guillaume vient de ce qu’elle porte sur une période quasiment sans inflation, remplacée par l’inflation des actifs.
Si l’on prend en compte cette dernière notion ( inflation des actifs) nous pouvons dire que nous avons de l’inflation actuellement, ce qui éclaire le raisonnement de Guillaume.
Bonjour Guillaume, Ils sortent d’ou ces 5,10%??? Chiffres de L’INSEE??
OCDE = https://data.oecd.org/fr/gdp/previsions-du-pib-nominal.htm#indicator-chart
C’est n’importe quoi !
Comment évoquer 5,10% alors qu’entre janvier 2000 et décembre 2021 la moyenne a été de 2,51%.
Et me meilleur est derrière nous.
L’acquis de croissance pour 2021 est de 4.80% : https://www.lesechos.fr/economie-france/conjoncture/rebond-de-la-croissance-au-deuxieme-trimestre-1335877
Bonjour,
dans le début de votre exposé, une phrase en forme de conclusion est assez étonnante (et ce n’est pas la première fois que vous raisonnez ainsi), vous dites:
« L’entreprise détruit de la valeur pour ses actionnaires ».
Tour d’aborde si tant est qu’elle détruise ce n’est pas « pour » mais « au détriment » de ses actionnaires, mais, de plus, comment peut-elle « détruire » ce qu’elle n’a pas reçu? Tout au plus s’agit-il d’un manque à gagner…
Certes je vous rejoins sur le fond et j’insisterais même sur le caractère pernicieux du « manque à gagner » si peu mis en avant dans bien des raisonnements.
Mais une chose me gêne: de quel chapeau allez vous sortir le lapin des 5,10%?
Cordialement,
jm
« ….En relatif, non seulement l’entreprise est en réalité en train de perdre des parts de marché dans son secteur d’activité (car la croissance de l’entreprise est inférieure à la croissance du secteur), mais avec une croissance inférieure à la croissance du pays, elle est victime d’un déclassement économique qui pourrait la porter au déclin. »
Si une entreprise perd des parts de marchés dans son secteur d’activité c’est soit que son business model est défaillant soit c’est une mauvaise gestion/ organisation.
En réalité, il y a très peu d’entreprise qui perdent dans un marché en expansion, car comme dit précédemment si elles sont mal gérées et ne se remettent pas rapidement en cause rapidement elles périssent – Cf. cas de Peugeot il y a quelques années
Je constate également l’erreur de raisonnement, à moins que ce ne soit voulu, certes il faudrait attendre 5,10% de croissance si on exclu l’année précédente. Mais il se trouve que l’année précédente à connu un déclin de -6% par conséquent plutôt que de positionner l’analyse sur une simple année, il convient de lisser sur les deux années pour voir le revenu sur ces 2 ans.
je suis heureux de voir que mon épargne a surperformé en 2020!!!