La famille évolue plus vite que le droit.
La famille recomposée est une nouvelle norme sociale mal appréhendée par les règles du droit des successions. En effet, le code civil et les règles successorales sont construites autour d’une vision traditionnelle de la famille avec l’idée sous-jacente de protéger le conjoint, parent des enfants communs, et de transmettre le patrimoine du défunt de manière équitable entre tous ses enfants. 
Malheureusement, ces règles successorales ne sont pas adaptées à la vie des Français et surtout à leur volonté d’une plus grande liberté dans l’organisation de leur succession :

  • Les relations avec les enfants du premier mariage ne sont pas toujours optimales ; Lors d’un remariage, ou tout simplement d’un divorce et d’une nouvelle union, union libre, PACSE, les enfants du premier mariage, notamment les enfants de l’homme, s’éloignent ; Il est extrêmement fréquent de faire le constat de relation difficile avec le père des enfants du premier mariage. La question est moins prégnante avec les enfants de la femme ; Une cliente me confiait ce constat très vrai : « Une mère n’oublie jamais ces enfants, alors qu’un père se concentre sur son nouveau mariage et ses nouveaux enfants (ou enfants de sa nouvelle épouse) ».

 

  • Les époux ne comprennent pas, et à raison, pourquoi le patrimoine qu’ils ont construit ensemble devra revenir aux enfants du premier mariage au décès du premier des époux. N’est-il pas « injuste » pour le nouveau conjoint de devoir partager SON patrimoine avec les enfants du premier mariage de son conjoint ? Cette situation est d’autant plus perçue comme insupportable que les relations avec les enfants du premier mariage ne sont pas excellentes !

 

  • A contrario, les enfants du premier mariage ne comprennent pas pourquoi ce serait l’enfant fruit de la nouvelle union ou les enfants du survivant des époux qui hériteraient en priorité ? Les enfants du premier mariage ne comprennent pas, et à raison, pourquoi ils seraient déshérités ou du moins désavantagés par rapport aux enfants de l’épouse (c’est souvent dans ce sens en application du principe « Une mère n’oublie jamais ces enfants, alors qu’un père se concentre sur son nouveau mariage et ses nouveaux enfants ou enfants de sa nouvelle épouse » ou des enfants communs.

 

Quels sont les droits successoraux du nouveau conjoint en cas de remariage ?

Lorsque les époux n’ont pas d’enfant de leur premier mariage.

En présence d’enfant commun avec le nouveau conjoint, ce dernier sera héritier et pourra choisir entre :

  • 100% en usufruit du patrimoine du défunt ;
  • 1/4 en pleine propriété du patrimoine du défunt ;

La partie de patrimoine qui ne sera pas recueillie par le conjoint sera alors transmise aux enfants du couple.
Dans cette première situation, c’est à dire en l’absence d’enfants issus de la première union, il n’y a pas de difficulté majeure : Le patrimoine est réparti entre conjoint et enfant du couple selon les règles classiques applicables à toutes les familles (cf »Protection du conjoint : quel héritage pour le conjoint survivant ? »)
 

Lorsque les époux n’ont pas des enfants de leur premier mariage.

Nous sommes là typiquement dans la situation d’une famille recomposée, c’est à dire une famille dans laquelle vit, idéalement en harmonie, enfants du premier mariage et enfants du second mariage.
Dans une telle situation de famille recomposée, le conjoint n’est héritier qu’à hauteur du 1/4 en pleine propriété du patrimoine du défunt.
De manière très pratique, cela signifie, si la résidence principale des époux appartenait aux deux, que le conjoint survivant devra indemniser ses beaux-enfants pour pouvoir rester dans la maison. Au décès d’une des époux, les enfants deviennent propriétaire d’une partie indivise de la maison et pourront donc faire valoir des droits sur celle-ci.
Néanmoins, et concernant la résidence principale, le conjoint survivant pourra demander à rester dans son logement et bénéficier d’un droit d’habitation sur le logement. Mais attention, ce droit d’habitation n’est pas gratuit, il sera déduit de la valeur de son héritage. Si les droits successoraux du conjoint survivant son de 1/4 du patrimoine du défunt, ils ne seront plus que de 1/4 – valeur du droit d’habitation, en cas d’utilisation de ce droit.
Le droit d’habitation est valorisé 60% de la valeur de l’usufruit déterminé en application de l’article 669 du CGI :

AGE
de l’usufruitier
VALEUR
de l’usufruit
VALEUR
de la nue-propriété
Moins de 21 ans révolus 90 % 10 %
Moins de 31 ans révolus 80 % 20 %
Moins de 41 ans révolus 70 % 30 %
Moins de 51 ans révolus 60 % 40 %
Moins de 61 ans révolus 50 % 50 %
Moins de 71 ans révolus 40 % 60 %
Moins de 81 ans révolus 30 % 70 %
Moins de 91 ans révolus 20 % 80 %
Plus de 91 ans révolus 10 % 90 %

 
Ainsi, comme vous pouvez le constater, en présence d’enfants du premier mariage, les droits du nouveau conjoint sont relativement réduits : Au décès d’un des époux, le survivant devra partager la moitié du patrimoine commun, ainsi que les biens propres du défunt avec ses beaux-enfants.
Mais à contrario, et contrairement à ce que nombre d’entre vous pensez, le conjoint est héritier des biens propres et personnels du défunt. Les biens de famille ne reviennent pas systématiquement aux enfants ! Ils seront partagés avec le nouveau conjoint, au moins pour 1/4 (cf »Succession : Le conjoint est héritier des biens propres et personnels de son conjoint pré-décédé. »).
 

Quelles solutions pour mieux protéger le nouveau conjoint en cas de remariage ?

La donation entre époux ou donation dernier vivant.

Pour augmenter les droits successoraux du nouveau conjoint en cas de remariage, la priorité doit être la mise en place d’une donation entre époux. Acte simple et surtout peu onéreux, la donation entre époux permettra pour les familles recomposées d’augmenter considérablement la protection du conjoint.
Ainsi, au lieu d’être limités à 1/4 du patrimoine, les droits successoraux du nouveau conjoint pourront être, au choix :
– 100% en usufruit ;
– 1/4 en pleine propriété et 3/4 en usufruit ;
– La quotité disponible : En présence de deux enfants : 1/3 du patrimoine du défunt : En présence d’un enfant : 1/2 du patrimoine du défunt ; En présence de 3 enfants et plus : 1/4 du patrimoine du défunt.
Le solde du patrimoine sera toujours attribué aux enfants du défunt (et donc aux enfants du premier mariage) mais l’usufruit permettra une meilleure protection du conjoint qui pourra ainsi continuer à jouir du patrimoine de son défunt conjoint sans avoir de compte à rendre aux enfants (cf »Usufruit, Nue propriété, Quasi-usufruit : Définition, droits et obligations. »).
 

L’adoption d’un contrat de mariage plus protecteur pour le nouveau conjoint : Une stratégie limitée par l’action en retranchement.

L’adoption d’un contrat de mariage très protecteur pour le conjoint survivant ne sera pas une solution parfaite en présence d’enfants d’un premier mariage.
En effet, au terme de l’article 1527 du code civil, l’action en retranchement à vocation à supprimer le bénéfice de clause du contrat de mariage trop généreuse au profit du nouveau conjoint.
Extrait de l’article 1527 du code civil :
Les avantages que l’un ou l’autre des époux peut retirer des clauses d’une communauté conventionnelle, ainsi que ceux qui peuvent résulter de la confusion du mobilier ou des dettes, ne sont point regardés comme des donations.
Néanmoins, au cas où il y aurait des enfants qui ne seraient pas issus des deux époux, toute convention qui aurait pour conséquence de donner à l’un des époux au-delà de la portion réglée par l’article 1094-1, au titre  » Des donations entre vifs et des testaments « , sera sans effet pour tout l’excédent ; mais les simples bénéfices résultant des travaux communs et des économies faites sur les revenus respectifs quoique inégaux, des deux époux, ne sont pas considérés comme un avantage fait au préjudice des enfants d’un autre lit.
 
Ainsi, les clauses du contrat de mariage qui aurait pour conséquence d’augmenter le patrimoine du conjoint serait sans effet par l’application de cette action en retranchement. En revanche, les placements ou l’épargne constituée à partir des revenus des époux pourront être attribués au survivant des époux, même si les revenus étaient inégaux et que seuls les revenus du défunt sont à l’origine de l’épargne et des placements.
Ainsi, le simple fait de se marier sous le régime de la communauté permet un transfert de patrimoine au bénéfice du survivant des époux à hauteur des économies faites par le couple sur leurs salaires ou les revenus de leur biens propres.
 
Prenons un exemple pour mieux comprendre, l’action en retranchement et ses limites… 
Monsieur et Madame X, sont mariés sous le régime de la communauté. Monsieur à un enfant d’un premier mariage.
Monsieur est salarié, il perçoit 10 000€ /mois ; Madame est également salariée, elle perçoit 1000€ /mois.
Après 25 ans de mariage, les époux disposent d’un patrimoine commun estimé à 500 000€ fruit de leur épargne (et notamment de l’épargne sur les revenus perçus par Monsieur).
Au décès de Monsieur, son fils pourra prétendre à être héritier pour partie du patrimoine de son père. Ce patrimoine est estimé à 500 000€/2 soit 250 000€. Madame conservera la pleine propriété de 250 000€, sans aucune contestation possible.
 

La clause bénéficiaire du contrat d’assurance vie pour transmettre un capital hors succession au nouveau conjoint.

Enfin, dernière stratégie simple mais terriblement efficace : La souscription d’un ou plusieurs contrats d’assurance vie au bénéfice du conjoint.
L’assurance vie est une stratégie simple pour transmettre un capital hors succession, c’est à dire, sans devoir respecter les règles civiles de la succession que nous vous avons présenté précédemment. En deux mots : L’assurance vie permet de faire ce que l’on veut de son épargne !
Vous n’êtes pas obligé de respecter les règles parfois strictes du code civil. Vous pouvez même utiliser l’assurance vie pour déshériter vos enfants (cf »Comment déshériter ses enfants en toute légalité ? »).
 
Ainsi, les époux peuvent souscrire un ou plusieurs contrats d’assurance vie au bénéfice du conjoint. Ils devront néanmoins respecter l’origine des fonds, afin de parfaitement contourner les règles civiles de succession :

  • Avec des fonds communs : Les époux devront mettre en œuvre une co-souscription, dénouement premier décès ;
  • Avec des fonds propres : Les époux devront mettre en œuvre une souscription nominative, dénouement premier décès

 

Et plus si affinité…

Il reste encore de nombreuses stratégies possibles … mais plus contestable telle que la tontine entre époux, le commodat, les sociétés civiles …
Mais avant d’envisager la mise en place d’une usine à gaz, assurez-vous d’avoir déjà mis en œuvre les stratégies simples …

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