Dans notre dernier article (Au-delà des droits de succession, ne pas négliger les frais de notaire), nous avons mené une réflexion autour de la nature des frais de notaire à régler lors d’une succession. Au terme de cette analyse, la problématique du financement de ces sommes s’est posée

C’est donc naturellement sur ce point que nous allons nous attarder aujourd’hui : Comment faire face au paiement des droits de succession et des frais de notaire ? Peut-on réellement s’y préparer ? Que faire si, le moment venu, les frais sont trop élevés ?

Détaillons ensemble les possibilités qui s’offrent à vous en fonction de l’estimation du montant que vous (ou vos héritiers) aurez à régler.

Estimer de manière fiable le montant approximatif des frais de succession

Sans surprise, l’anticipation des frais de succession coïncide avec la connaissance du montant que vous (ou vos héritiers) aurez à payer ! Et qui se décompose en deux parties : 

  • frais de notaire ;
  • droits de succession.

Les frais de notaire

De manière générale, une succession se décompose en trois actes principaux :

  • l’acte de notoriété, qui constate la qualité des héritiers ;
  • l’attestation immobilière, qui assure le transfert officiel des immeubles du patrimoine du défunt vers celui de leurs nouveaux propriétaires ;
  • la déclaration de succession, qui liste les éléments constitutifs de la succession et détermine le montant des droits.

La préparation de ces actes notariés a un coût. C’est ce que l’on appelle les « frais de notaire ».

À titre d’exemple, lorsqu’un bien immobilier d’une valeur de 100 000 € doit être transmis, la signature de l’attestation de propriété immobilière génère :

  • des émoluments d’acte pour 704 € ;
  • des émoluments de formalités pour 470 € ;
  • des droits d’enregistrement pour 125 € ;
  • une CSI pour 100 € ;
  • de la TVA pour 235 € ;
  • des débours estimés à 95 €.

Soit un montant total de 1 729 €. Le guide de la taxe propose un simulateur sur lequel vous pouvez vous baser pour estimer facilement le montant de ces frais.

La déclaration de succession, quant à elle, a un coût hors des droits de succession. Pour un actif de 150 000 €, il sera de 1 190 € répartis de la manière suivante :

  • des émoluments d’acte pour 777 € ;
  • des émoluments de formalités pour 215 €
  • de la TVA pour 198 €.

Idem que pour l’attestation immobilière, un simulateur du guide de la taxe est à votre disposition pour vous aiguiller dans vos calculs.

Les droits de succession

Rappel des règles générales de calcul

En matière de droits de succession, il faut raisonner au cas par cas, en fonction de votre lien de parenté avec le défunt.

Le conjoint et le partenaire de pacs sont les plus avantagés puisqu’ils sont totalement exonérés de droits de succession. 

À noter que le pacs n’entraîne aucun droit légal sur le patrimoine du partenaire en cas de décès : un testament est indispensable.

Les frères et sœurs sont également susceptibles d’obtenir une telle exonération en fonction de trois critères cumulatifs :

  • être célibataire, veuf, divorcé ou séparé lors du décès ;
  • être âgé d’au moins 50 ans ou handicapé ;
  • avoir été domicilié avec le défunt de manière continue durant les 5 années précédant sa disparition.

Tout autre héritier bénéficie d’un abattement propre dont le montant est plus ou moins important en fonction de son statut (article 777 du Code général des impôts).

Le calcul des droits de succession prend appui sur deux éléments indispensables :

  • L’actif net taxable est le fruit d’une balance entre les biens et les dettes, déduction faite des frais funéraires pour 1 500 €. Cette somme est répartie entre les héritiers selon la part à laquelle ils ont droit.
  • De cet actif successoral est déduit l’abattement individuel que nous avons évoqué un peu plus haut. Le résultat obtenu est la part taxable, le montant à partir duquel les droits vont être calculés.

Pour en savoir plus et calculer le montant : Mode d’emploi pour calculer les droits de succession.

Mise en garde sur les événements imprévisibles

Si, en théorie, la détermination des droits de succession semble simple, il ne faut pas oublier de prendre en compte les cas particuliers.

En effet, la part des biens vous revenant, en tant qu’héritier légal, est conditionnée à d’autres facteurs :

  • L’existence d’un testament peut remettre en cause la répartition légale. Si l’impact est moindre en présence d’héritiers réservataires (de descendants), il ne doit pas être minimisé dans les autres cas de figure. En effet, l’existence de descendants implique le respect de la réserve héréditaire : la liberté ne s’applique qu’à la quotité disponible. En l’absence de tels héritiers, il est possible de disposer de l’ensemble de son patrimoine en le léguant à toute personne de son choix.
  • Le conjoint survivant joue également un rôle déterminant en termes de répartition du patrimoine, tel qu’expliqué dans l’article « Protection du conjoint : quel héritage pour le conjoint survivant ? ». Le choix de son option successorale est généralement dicté par sa situation financière et familiale lors du décès.
  • Comme vous l’avez compris, le calcul des droits est intimement lié à la qualification de l’ensemble des héritiers. Le prédécès d’un d’entre eux remet donc en question les prévisions.

Estimation des droits de succession sur internet

Si vous connaissez le montant de votre part dans la succession, le site Service-Public.fr met également à disposition un simulateur afin d’estimer les droits de succession.

Qui paie quoi ?

Une fois le total déterminé vient la question de la répartition. À qui incombe le paiement des frais de notaire ? Qui doit payer les droits de succession ?

En principe, les frais engendrés par les actes sont payés par tous les héritiers, au prorata de leurs droits dans la succession. Il existe cependant un cas particulier : lorsque le conjoint survivant opte pour l’usufruit, il peut prendre en charge la totalité des frais.

Pas de surprise pour le paiement des droits de succession : chacun paie ceux auxquels il est soumis.

Qu’en est-il si les liquidités présentes dans l’actif successoral ne suffisent pas à s’acquitter de ces frais ? Deux solutions se présentent à vous :

  • la vente d’un bien ;
  • l’anticipation.

Vendre un bien pour payer les droits et frais de succession

Vendre un bien dépendant de la succession est tout à fait envisageable. Le seul obstacle demeure le délai imposé par l’administration fiscale pour le paiement des droits

Obligation de payer les droits de succession dans les 6 mois

Vous le savez, la déclaration de succession doit être déposée auprès du centre des finances publiques dans les 6 mois du décès. Ce dépôt entraîne systématiquement le paiement des droits, auquel il n’est pas possible de se soustraire.

À noter : les héritiers sont solidaires du règlement face à l’administration fiscale. En cas de non-acquittement, cette dernière peut se tourner vers l’héritier le plus solvable afin d’obtenir réparation.

Dans l’hypothèse d’un retard, des pénalités s’appliquent : 

  • un intérêt de retard égal à 0,20 % par mois, soit 2,4 % par an ;
  • une majoration de 10 % à 80 %, en fonction des cas.

Si la vente d’un bien est nécessaire à l’acquittement des droits, ce délai n’est pas toujours confortable. En effet, il semble difficile (pour ne pas dire impossible) de conclure une vente dans un laps de temps si restreint.

Généralement, il faut compter environ 3 mois à compter de la signature du compromis pour qu’un rendez-vous de signature soit fixé par le notaire…

Tolérance de l’administration fiscale en cas de longs délais

En pratique, face à une telle discordance des délais, il convient d’avoir recours à :

  • un paiement différé : lorsque les biens sont recueillis en nue-propriété (ou avec un droit viager d’habitation), les droits sont payés lors de l’extinction de l’usufruit ou du droit viager;
  • un paiement fractionné : plusieurs échéances de paiements sont étalées sur une période d’un à trois ans.

Pour ce faire, il suffit de joindre une demande écrite jointe à la déclaration de succession, lors de son dépôt.

Cependant, ces solutions peuvent mener à la demande de prise de garantie par l’administration fiscale et au versement d’intérêts, afin de sécuriser l’opération. Elles ne sont donc pas les plus confortables et sécurisantes.

Anticiper le paiement de frais de succession importants

Une fois de plus, pour une meilleure sécurité juridique et financière, l’anticipation est de mise. 

Deux options :

  • transmettre par anticipation ;
  • épargner.

Solution n° 1 : Organisation d’une transmission anticipée de votre patrimoine 

La donation est le moyen le plus efficace de transmettre votre patrimoine de votre vivant. 

Donner en nue-propriété sera particulièrement intéressant : 

  • En conservant l’usufruit, vous vous assurez de conserver votre logement ou un revenu (en cas d’investissement locatif).
  • Financièrement, les droits de succession (= Droit de mutation à titre gratuit pour être plus rigoureux= seront moindres). L’assiette de la donation sera diminuée, car réduite de la valeur de l’usufruit. Les frais de notaire sont eux calculés sur la valeur en pleine propriété du bien donné (Cf. « Quels sont les frais de notaire sur la donation d’un bien immobilier ou d’une somme d’argent ?« )

Bien évidemment, la durée de renouvellement de l’abattement doit être prise en compte. En effet, il est à nouveau entièrement disponible tous les 15 ans. Une anticipation suffisante pourrait ainsi vous permettre de bénéficier de l’abattement complet lors de la donation et également lors de l’ouverture de la succession.

Les frais de notaire et éventuels droits de succession pourront alors être payés par le donateur (= celui qui donne) sans que cela ne constitue une donation complémentaire (Cf. « Le paiement des droits de donation par le donateur n’est pas considéré comme une donation supplémentaire« ).

C’est là un avantage considérable qui doit vous encourager à envisager une donation au-delà des abattements comme nous vous l’expliquions dans cet article « Réduire les droits de succession grâce au rappel fiscal des donations de moins de 15 ans« .

Solution n° 2 : constitution d’une épargne suffisante destinée au paiement des frais

Vous en êtes certain, des droits de succession découleront du décès d’un de vos proches ou seront dus par vos héritiers. En prévision de cette transmission de patrimoine, pourquoi ne pas mettre quelques économies de côté ? 

Vous constituer une épargne dédiée, peu importe le support, vous permet de disposer ou de transmettre suffisamment de liquidités au moment du règlement de la succession pour ne pas avoir à vendre un bien immobilier dans l’urgence…

Une épargne qui pourrait être placée dans un contrat d’assurance-vie au bénéfice des enfants. En effet, les droits de succession sont à payer par les enfants, il convient donc de permettre aux enfants d’avoir les moyens de les payer.

Un contrat d’assurance-vie au bénéfice du conjoint n’a aucune utilité, sauf à vouloir le protéger davantage au détriment des enfants (cf. « Assurance vie : Une clause bénéficiaire au profit des enfants pour payer les droits de succession).

Dans la majorité des cas, on pourra avantageusement se passer de l’assurance-vie. Deux options seront alors envisageables :

  • Le defunt précautionneux aura rédigé un testament au terme duquel il aura attribué une partie de cette épargne en pleine propriété aux enfants ;
  • Après le décès de son conjoint, le conjoint survivant, usufruitier des sommes d’argent, devra réaliser un abandon d’usufruit ou une donation de somme d’argent pour permettre à ses enfants de récupérer les liquidités nécessaires (cf. « Succession : Que deviennent argent et placements du conjoint décédé et du couple ?« ) ;

A suivre…

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