Nous inaugurons aujourd’hui l’édito de Jean Noel VIEILLE, gérant du Fonds KBL RICHELIEU FLEXIBLE. 
Toutes les fins de semaines, M VIEILLE nous livrera sa vision des marchés et ses anticipations.
« Tentons d’y voir un peu plus clair… . Nous assistons à une évolution économique et financière qui se dégrade un peu plus chaque jour. Plus qu’une opinion, c’est d’abord un constat. Revenons sur le Quantitative Easing 2. C’est la première fois que cette mesure fait l’objet de critiques fortes de la quasi totalité des autres puissances mondiales : Japon, Brésil, Inde, Chine et Allemagne. Ces pays ont clairement signifié début novembre qu’ils ne comptaient plus laisser la Reserve Federal imprimer à volonté des dollars US pour résoudre les difficultés des Etats-Unis. Le dollar doit redevenir une devise nationale et rester en conséquence le reflet du pays qui l’émet. Fini le temps du dollar, monnaie des Etats-Unis et problème du reste du monde. 

C’est une information importante car ceci signifie aussi, au delà de ce que déclare la FED, qu’il ne pourra pas y avoir de quantitative easing 3, sauf à alimenter un conflit dangereux avec la Chine en particulier, et à jouer l’effondrement du dollar. Ceci repose avec une acuité nouvelle la question de la croissance économique américaine. Il faut moins sous-estimer l’hypothèse d’un « double dip ». Les leviers d’une accélération de la croissance US sont en effet de plus en plus compliqués à mettre en oeuvre. L’immobilier va-t-il repartir ? Quid des exportations, de la confiance du consommateur et du taux de chômage ? Le ralentissement programmé de la Chine, par un transfert des dépenses d’infrastructures et d’investissement au profit de la consommation pourrait également limiter la croissance des Etats-Unis et accessoirement aussi celle de l’Allemagne. Il n’est pas anodin que l’on commence à parler de la possibilité d’un hard landing chinois. Les craintes sont aussi alimentées par l’effet négatif d’une paralysie politique à Washington (Président démocrate, chambre des représentants républicains, sénat à faible majorité démocrate et élus « tea party » quelque peu encombrants). La question de la réduction des déficits va donc revenir rapidement au devant de la scène et on pourrait assister à la mise en place d’un plan d’austérité assez radical. 
Le risque majeur se situe bien dans le mélange explosif en 2011 que pourraient constituer un ralentissement US, une croissance molle en Europe et un « hard landing » en Chine. Couplée à la question toujours non résolue des dettes souveraines, la situation boursière de 2011, pourrait ainsi s’annoncer au mieux assez chaotique et au pire franchement baissière. 
Le principal risque lié à l’Irlande est son système bancaire devenu totalement insolvable. Les créanciers étrangers totaliseraient un montant de 170 Md$ sur le Q1 2010. Les banques allemandes auraient la plus grande partie, 46 Md$, suivi par la Grande-Bretagne (42) et la France (21). Rappelons en référence que le PIB de l’Irlande n’est que de 160 Md€. Eu égard à cette situation, Angela Merkel prendra-t-elle le risque d’acculer l’Irlande à un défaut de paiement ? Pas si sur … .
La crise de la dette souveraine irlandaise renvoie une nouvelle fois à la crise du système bancaire. On rappellera que l’ensemble des banques européennes a subit cet été des stress tests, dont le marché a applaudi à l’époque des résultats particulièrement encourageants, puisque tous les bilans sont sortis conformes sauf 7 malheureux acteurs, mais aucun irlandais. Quelle pertinence et efficacité des tests ! Ainsi, cette semaine, le marché boursier et celui de la dette ont paniqué ensemble. La crise du système bancaire irlandais renvoie en effet à une crise systémique du système bancaire européen eu égard aux maillages des créances. L’Irlande vient d’être dégradée par S&P de AA- à A et le gouvernement a annoncé un nouveau plan d’austérité (15 Md€, soit 10% du PIB, 2/3 en coupes budgétaires et 1/3 en augmentation des impôts). 
Nous devrions prochainement assister à une quasi nationalisation du système bancaire irlandais. Et les marchés vont commencer à spéculer sur une contagion vers de l’Espagne et le Portugal, le coût de la dette espagnole à trois mois étant, à titre d’exemple, supérieur à ce que l’Allemagne paie pour 5 ans. 
Dans notre allocation d’actifs nous maintenons toujours une exposition quasi-nulle au secteur financier, secteur considéré comme trop risqué et surtout beaucoup trop volatil, de même que les secteurs cycliques et ceux liés aux dépenses des Etats (armement, construction, ….).
Ces derniers jours ont été tumultueux et ceci permet d’analyser la performance de la sicav dans ces moments difficiles, cf graphe ci-dessous. Depuis début novembre, la Sicav a stabilisé sa performance contre un CAC 40 à -2,24% et l’indice de référence FTSEurofirst 300 est également flat, aidé par une part plus importante de valeurs moyennes, qui continuent à mieux performer que les grandes valeurs. Au 25/11, la Sicav est composée d’actions pour 90,8%, d’obligations pour 2,25%, le cash étant de 7.0%. Les couvertures étaient à 46,4%, ce qui donne une exposition nette aux actions de 46,6%. Nous avons allégé l’exposition dans le dernier mouvement haussier ce qui nous a permis de se protéger dans la forte baisse du 23/11. Depuis le début de l’année, et au 25 novembre, nous réalisons une performance de +4,55%, contre un indice CAC 40 à -4,47%. 
Le graphe ci-après donne l’évolution de la performance sur l’année 2010 (au 24/11/2010), on constate assez bien surtout sur les derniers mois une stratégie forte d’atténuer la volatilité, tout en réalisant de la performance. Nous allons tenter de poursuivre cette même stratégie la semaine prochaine. Nous maintenons toujours notre opinion qu’à des niveaux supérieurs à 3750 (pour le CAC), les marchés nous semblent toujours pouvoir receler un potentiel de baisse. « 
Jean-Noël Vieille