France stratégie vient de publier son rapport sur les conséquences de la suppression de l’ISF, création de l’IFI et instauration de la flat tax sur les revenus mobiliers et notamment les dividendes. Le dossier est épais, mais le propos pourrait être simplifié en quatre mots : On ne sait pas si la réforme a été bénéfique pour l’économie (300 pages pour expliquer que l’on ne se sait pas), mais en revanche on sait qui en a profité.
Voici quelques morceaux choisis du rapport « COMITÉ D’ÉVALUATION DES RÉFORMES DE LA FISCALITÉ DU CAPITAL » :

  • L’observation des grandes variables économiques – croissance, investissement, flux de placements financiers des ménages, etc. – avant et après les réformes ne suffira pas pour conclure sur leur effet réel ; En particulier, il ne sera pas possible d’estimer par ce seul biais si la suppression de l’ISF a permis une réorientation de l’épargne des contribuables concernés vers le financement des entreprises. Les fluctuations des variables agrégées résultent de l’addition de multiples facteurs, de nature très diverse.

 

  • Le seul élément tangible qui peut être relevé à ce stade sur données agrégées est la forte progression des dividendes reçus par les ménages en 2018, comparable dans son ampleur à la chute enregistrée en 2013, au moment où les revenus mobiliers ont été intégrés au barème progressif de l’IR. L’effet causal de la réforme de la barémisation en 2013 d’une part, des réformes de 2018 d’autre part, sur ce double mouvement est plausible, mais il n’est à ce jour pas scientifiquement établi, ni a fortiori mesuré précisément ;

 

  • Le passage de l’ISF en IFI a réduit le nombre d’assujettis de 360 000 à 130 000. Il a eu en effet pour conséquence d’exonérer d’impôt sur le stock de patrimoine l’essentiel des contribuables ISF les moins fortunés (quatre sur cinq parmi la moitié basse des patrimoines imposables à l’ISF). À l’inverse, parmi les 0,1 % très fortunés en 2017, seul un sur dix n’est pas contribuable à l’IFI en 2018. Cependant, quel que soit le niveau de patrimoine déclaré en 2017, les contribuables à l’ISF ont bénéficié de baisses d’impôt importantes, y compris ceux qui sont aujourd’hui imposables à l’IFI : en moyenne, l’impôt acquitté a été divisé par trois et demi.

 

  • Les recettes de l’IFI en 2018, nettement supérieures à celles anticipées (1,3 milliard d’euros hors contrôle fiscal1 contre 850 millions), sont inférieures de 2,9 milliards à celles de l’ISF en 2017 (4,2 milliards).

 

  • Le coût budgétaire du PFU fait l’objet d’estimations convergentes, comprises entre 1,4 et 1,7 milliard d’euros hors effets de comportement. Il serait donc un peu inférieur à l’estimation faite ex ante(1,9 milliard). En outre, le surcroît de dividendes versés en 2018 (+60 % par rapport à 2017) a généré un surcroît de recettes fiscales et sociales, même s’il n’est pas possible à ce stade de quantifier la part de gain additionnel directement liée à la mise en place du PFU

 

  • S’agissant de la mise en place du PFU, les gains fiscaux seraient concentrés sur les 15 % des ménages les plus aisés et, au sein de ces 15 %, ils seraient plus importants encore pour le tiers supérieur (top 5 %), avec pour ces derniers des gains moyens en termes de niveau de vie de près de 1 000 euros par an.

 

  • S’agissant de la transformation de l’ISF en IFI, l’étude mobilisant les informations statistiques les plus complètes conduit à estimer que les 5 % des ménages les plus aisés perçoivent 57 % des gains, et que quatre ménages gagnants sur cinq se situent parmi les 15 % les plus aisés. Le gain annuel moyen d’un ménage gagnant est de l’ordre de 6 500 euros de niveau de vie.

 

  • Les deux réformes favorisent dans un premier temps les ménages les plus aisés, mais leur impact sur les inégalités dans leur ensemble demeure limité, car les montants en jeu restent faibles par rapport aux montants totaux des prélèvements et prestations du système socio-fiscal français ;

 
Bref, on ne sait pas si cette réforme a été bénéfique pour l’économie et le pays, en revanche elle semble avoir été particulièrement bénéfique pour les 5% les plus riches redevables de l’ISF et les 15% des contribuables dont les revenus sont les plus élevés.
Le ruissellement est parfois un peu long.
Il n’y a pas de mal à se faire plaisir 😉