Dans une récente analyse publiée sur la site de la Banque de France sous le titre « Télétravail et immobilier d’entreprise« , les économistes Antonin Bergeaud, Jean-Benoît Eymeoud, Thomas Garcia et Dorian Henricot expliquent que :

En France, le marché de l’immobilier d’entreprise commence à s’ajuster à l’essor du télétravail et son impact sur l’immobilier de bureaux est déjà visible.

Dans les départements plus exposés au télétravail, la crise Covid-19 a entraîné une hausse des taux de vacance et une baisse de la construction et des prix.

Les indicateurs de long terme suggèrent que les marchés anticipent une utilisation durable du télétravail.

Télétravail et immobilier d’entreprise

Le télétravail s’inscrit dans la durée. L’après Covid-19 intègre le télétravail comme une nouvelle norme de travail.

C’est une conviction que nous partageons avec vous depuis longtemps et cela bien avant la crise du Covid. Depuis longtemps, nous portons une regard particulièrement prudent sur les SCPI de bureaux tant la révolution numérique tend à modifier l’usage des bureaux, et donc leur valeur future.

Cette évolution du marché de l’immobilier de bureaux, nous vous l’expliquons depuis très longtemps. Des 2014, nous vous sensibilisions à la question du nomadisme d’entreprise dans cet article par exemple : « SCPI : Anticiper les mutations du marché de l’immobilier de bureaux avant d’investir« .

Dès les premiers jours du confinement de mars 2020, nous vous alertions sur ce tsunami qui allait bouleverser le marché avec cet article important « Le télétravail, un tsunami qui va bouleverser l’immobilier de bureaux et l’investissement en SCPI ?« 

Aujourd’hui, plus de 8 ans après nos premières analyses et 2 années après le premier confinement, il ne fait plus aucun doute que le télétravail est inscrit pour durer. Les prédictions sont devenues réalité. Le télétravail devient incontournable pour tous. Plus personne n’envisage un retour au bureau comme avant la crise du Covid.

Bien évidemment, personne n’envisage sérieusement un télétravail 5 jours par semaine qui serait destructeur de cette fiction sociale qu’est l’entreprise ; En revanche 1, 2 ou 3 jours par semaine semble être un rythme bénéfique pour tous, tant pour la productivité des entreprises que pour un meilleur équilibre des salariés.

L’expérience du confinement et du télétravail est également à l’origine d’une prise de conscience générale quant à la localisation du siège de l’entreprise. Les salariés, eux, ont la réponse : Ils veulent donner la priorité à la qualité de vie et ne veulent plus subir la qualité de vie dégradée imposée dans les grandes métropoles.

La grande démission (cf. « « La grande démission », la nouvelle rupture qui oblige le capitalisme à s’adapter« ) en cours est en train de profondément modifier la donne : Dans ces périodes de manque de main d’œuvre qualifiée, pour attirer les salariés, les entreprises vont devoir s’adapter aux souhaits des salariés, et probablement envisager d’ouvrir des bureaux, là ou les salariés ont envie de vivre.

Ce ne sont plus les salariés qui se déplacent pour se rapprocher de l’entreprise, mais l’entreprise qui va devoir se rapprocher des salariés comme nous vous l’expliquions dans cet article « Immobilier : Vers une grande délocalisation des entreprises vers la province ?« .

Toutes ces modifications sont structurantes pour le marché immobilier, et donc pour l’investissement en SCPI :

  • Pour l’immobilier d’habitation avec des mouvements démographiques puissants au départ de Paris et de l’île de France au profit des villes moyennes à la qualité de vie enviable (Cf. « Immobilier : Ces villes moyennes à fort potentiel dans lesquelles investir !« ) ;
  • Pour l’immobilier de bureaux avec une moindre demande de bureaux dans les régions et villes à forte intensité de télétravail puis dans un second temps, une nouvelle dynamique dans les villes moyennes qui voient arriver ces salariés en quête d’une meilleure qualité de vie.
  • Pour l’immobilier commercial dont la dynamique est historiquement liée à la dynamique du marché immobilier d’habitation.

Ces évolutions structurelles sont fondamentales pour l’avenir des SCPI.

Revenons à cette étude de la Banque de France qui analyse les premières conséquences de l’adoption du télétravail sur l’immobilier de bureaux.

Extrait :

« L’essor spectaculaire du télétravail constitue probablement l’un des principaux effets durables de la pandémie de Covid-19 sur l’organisation du travail. Contraints par les circonstances, employeurs et salariés ont dû adopter de nouveaux modes de travail à distance afin de limiter les interactions physiques durant les phases aiguës de la crise sanitaire. Cette expérience a conduit les entreprises à investir davantage dans le matériel informatique et à adapter leurs pratiques managériales. Ainsi, le télétravail constitue déjà pour de nombreux salariés une pratique courante qui devrait se pérenniser dans les années à venir (Barrero et al.,2021).

Par ailleurs, la polarisation de l’activité économique a entraîné une hausse significative des prix de l’immobilier dans les zones dynamiques au cours des vingt dernières années. L’immobilier de bureaux ne fait pas exception : le coût de l’immobilier d’entreprise pèse de plus en plus sur la rentabilité des entreprises (Bergeaud et Ray, 2020). Celles-ci pourraient donc profiter de l’essor du télétravail pour réduire leur demande de surfaces de bureaux, ce qui est susceptible d’entraîner un ralentissement structurel du marché de l’immobilier d’entreprise.

Aux États-Unis, Bloom et Ramani (2021) montrent que la pandémie et l’augmentation du télétravail ont déjà un effet substantiel sur la dynamique spatiale de l’immobilier dans les villes et parlent d’un « effet doughnut » avec une croissance des prix de l’immobilier qui s’essouffle dans le centre des villes mais reste dynamique en périphérie. Dans un article récent (Bergeaud et al., 2021), nous examinons les premiers signes d’un tel ajustement en France« 

Indice de télétravail par département

Bref, croyez-vous encore dans l’avenir des SCPI ?

Cela fait maintenant des années que je vous explique que je ne comprends pas l’intérêt de l’investissement en SCPI. Des années que les faits me donnent tort, pourtant, je n’arrive pas à changer d’avis.

J’ai tort, mais je n’en démords pas. A mon sens, les SCPI ont un piètre intérêt patrimonial ; Trop chères, pas assez rentables et surtout des perspectives peu enthousiasmantes sur la valeur fondamentale de l’immobilier de bureaux ou de commerce.

Je ne comprends pas la pertinence de l’investissement en SCPI. Qui peut aujourd’hui investir dans de l’immobilier de bureaux alors que le télétravail devrait profondément modifier la demande de bureaux (tant en terme de localisation, de prix du loyer que de quantité) ?

Aujourd’hui, le rendement moyen des SCPI est d’environ 4% / 5%. Déduction faites de l’impôt sur le revenu, il reste moins de 2.50% par année pour l’épargnant taxé dans une tranche marginale d’imposition à 30% + 17.2% de prélèvement sociaux ? Une rentabilité médiocre au regard du risque.

Quant aux SCPI placées dans un contrat d’assurance-vie, quelle rentabilité reste t’il après paiement des frais de gestion du contrat d’assurance-vie ?

Pourquoi les vendeurs de SCPI s’obstinent t’ils à vendre des SCPI malgré tout ces risques sur l’avenir des SCPI ?

ps : Les retro-commissions sur les SCPI sont autour de 5% du montant souscrit. Cela permet probablement d’expliquer certaines convictions.

A mon sens, il est urgent d’attendre, probablement de vendre les SCPI les plus exposées à ces évolutions structurelles.

Ceux qui voudraient absolument investir en SCPI devront privilégier les SCPI de création très récentes qui n’auraient pas à subir les conséquences de l’évolution du marché sur leur stock comme nous vous l’expliquons dans cet article « SCPI : Et si c’était vraiment le bon moment d’investir ?« 

Et ne me parlez pas des SCPI de santé ! Si vous avez le sentiment qu’il est pertinente d’investir dans les murs d’un EHPAD après l’affaire ORPEA, je ne peux plus rien pour vous.

A suivre.