Vous êtes nombreux à avoir abandonné l’idée de vous verser des dividendes depuis la loi de financement de la sécurité sociale de 2013 qui impose le paiement du RSI sur les dividendes versés aux gérants majoritaires de SARL. Plus globalement, face à une fiscalité de l’impôt sur le revenu considérée à raison comme confiscatoire par de très nombreux chefs d’entreprise, les stratégies de capitalisation des revenus au sein de la structure d’exploitation ou de la holding animatrice de groupe se sont fortement développées.
Cette stratégie de capitalisation des bénéfices (en opposition avec la stratégie de distribution des bénéfices) est relativement simple à comprendre. Lorsqu’une entreprise réalise des bénéfices, deux trois options s’offrent à elle :

Soit distribuer les bénéfices à ses actionnaires ; Ces derniers recevront alors des dividendes et devront payer le RSI (s’ils sont gérant majoritaire de SARL – cf »Rémunération du dirigeant / chef d’entreprise : TNS affilié RSI ou Assimilé-salarié ? Notre simulateur.« ) et l’impôt sur le revenu. Autant dire qu’il ne reste plus grand chose des bénéfices distribués.

Soit conserver les bénéfices pour financer de futurs investissements nécessaires à la recherche de la satisfaction de l’objet social de la société d’exploitation. C’est une décision de saine gestion de conserver une partie des bénéfices pour financer de prochains investissements.

Soit conserver les bénéfices, non pour financer de futurs investissements, mais pour progressivement transformer la société d’exploitation en structure patrimoniale en attendant de meilleurs jours fiscaux (pour une distribution de dividendes moins onéreuse) ou une cession qui permettra de transformer les bénéfices non distribués (normalement taxés en dividendes + RSI pour les gérants majoritaires de SARL + prélèvements sociaux pour actionnaires autres) en plus values de cession de valeurs mobilières.

Dans une telle troisième hypothèse, l’imposition des dividendes se transforment en imposition des plus-values et le chef d’entreprise bénéficie d’un abattement proportionnel de 65% à 85% après 8 ans de détention + 500 000€ d’abattement fixe lorsqu’il part en retraite au moment de cette cession (cf » Plus-value de cession d’actions, d’entreprises ou de parts sociales : Quel taux réel d’imposition ? et Cession d’entreprise : détail sur l’imposition des plus values en 2016). Cette taxation au titre des plus-values est nettement préférable à la taxation au titre des dividendes.

 
 

Mais, seule la valeur correspondant aux éléments du patrimoine social nécessaires à l’activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale de la société est considérée comme un bien professionnel exonéré d’ISF.

Du point de vue de l’ISF, cette stratégie fiscale de capitalisation des bénéfices n’est pas sans conséquences. En effet, les dividendes non distribués et capitalisés, soit dans la société d’exploitation, soit dans la holding animatrice (cf »Enfin, une définition de la « holding animatrice » ? Experts comptables, avocats et notaires la définissent ensemble« ), ne se retrouvent pas dans le patrimoine privé du chef d’entreprise et pourront alors bénéficier de l’exonération au titre des biens professionnels.
Néanmoins, l’article 885 O Ter du code général des impôts est moins généreux. Le principe de l’exonération au titre des biens professionnels est limpide :

« Seule la fraction de la valeur des parts ou actions correspondant aux éléments du patrimoine social nécessaires à l’activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale de la société est considérée comme un bien professionnel. »
 

Toute la question est alors pour l’administration fiscale de démontrer que la trésorerie n’est pas indispensable à l’exploitation et à l’activité de la société d’exploitation ou de la holding animatrice. L’administration fiscale cherchera à déterminer la partie de la trésorerie qui ne serait pas « professionnelle » car non justifiée par les besoins de l’activité actuelle ou future.
Vous l’aurez compris, les liquidités d’une société constituent des actifs nécessaires à l’activité professionnelle, sauf preuve contraire par l’administration fiscale. Le chef d’entreprise prévoyant sa défense aura à cœur d’anticiper cette menace en justifiant préalablement des projets d’utilisation de cette trésorerie (croissance externe, investissement massif).
Dans le cas d’une trésorerie manifestement abusive, la partie de la trésorerie non indispensable à l’activité, et jugée comme tel par l’administration fiscale devra être déclarée par le contribuable au titre de l’ISF. Cette trésorerie « non professionnelle » ne pourra pas bénéficier de l’exonération réservée aux seuls biens professionnels. Mais attention, cela ne remet pas en cause l’ensemble de la valeur des titres, mais uniquement la valeur de ces derniers représentative de cette trésorerie excessive et abondante.
On comprend aisément l’esprit de la loi. Si l’outils de travail du redevable de l’ISF est exonéré d’ISF, la partie excessive, non indispensable à l’exercice de cette profession doit être considéré comme un actif personnel et patrimonial imposable à l’ISF.
C’est également à partir de ce raisonnement que l’immobilier d’exploitation détenu en direct ou via une SCI par l’associé d’une société d’exploitation exonérée d’ISF n’est que partiellement considéré comme un bien professionnel. En effet, dans une telle situation, les biens ou droits immobiliers en cause ne sont considérés comme professionnels qu’en proportion des droits détenus par le redevable, son conjoint ou son concubin notoire et leurs enfants mineurs dans la société à activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale (cf »ISF : Quels abattements possibles sur l’immobilier (locatif, Parts SCI, Résidence principale) ?).
 

Vivement l’année prochaine que l’ISF soit définitivement supprimé 🙂 – Présidentielle 2017, la suppression de l’ISF dans tous les programmes ?