Dans l’esprit de nombre de Français, le droit de succession est une succession de règles stricte qui ne laissent que peu de latitudes aux familles qui souhaitent organiser leur succession de manière indépendamment des « règles » de principe édictées par le code civil.
Ce n’est pas vrai. Le code civil est d’une grande souplesse pour celui qui saura le lire. Par exemple, il est de coutume de croire qu’il n’est pas possible de déshériter ses enfants et plus généralement ses héritiers dits réservataires. C’est l’application des notions de réserve et de quotité disponible que nous vous présentons dans cet article « Qu’est ce que réserve héréditaire et quotité disponible ? Comment les calculer, l’éviter ou la contourner ? ».
Néanmoins, lorsque l’intérêt de la famille l’impose, il est tout à fait possible d’envisager de déshériter totalement ou partiellement un héritier réservataire grâce à la rédaction d’un acte de renonciation anticipée à l’action en réduction.
Les situations familiales sont multiples et ne peuvent se résumer dans ces quelques lignes. Voici quelques exemples :

  • Dans le cadre d’une transmission transgénérationnelle, un enfant peut accepter d’être héritier pour une part inférieure à sa réserve afin de faire bénéficier ses propres enfants d’une partie de sa vocation héréditaire (cf »Succession : Sauter une génération et transmettre directement aux petits enfants ?).
  • La renonciation anticipée à l’action en réduction peut également être envisagée dans certaine situation particulière dans laquelle il convient de protéger un enfant handicapé en lui transmettant une part importante du patrimoine familial.

Chaque famille peut avoir ses raisons à vouloir avantager un enfant et donc déshériter totalement ou partiellement un héritier réservataire. Grâce à la renonciation anticipée à l’action en réduction, l’héritier réservataire peut accepter de recevoir moins que sa réserve héréditaire.
 
La renonciation anticipée à l’action en réduction est l’un acte important qui pourra être mis en œuvre par les familles afin de mettre en échec le risque de mise en œuvre de l’action en réduction par des héritiers qui se verraient héritier pour une part inférieure à leur réserve héréditaire.
Grâce à la renonciation anticipée à l’action en réduction, les héritiers acceptent, du vivant de leur parent, d’être héritier pour une part inférieure à la réserve. Ils acceptent, par avance, de ne pas intenter d’action en réduction (cf »Succession : Comment demander l’action en réduction des donations pour atteinte à la réserve héréditaire ?).
La renonciation anticipée à l’action en réduction est présentée à l’article 929 du code civil :

« Tout héritier réservataire présomptif peut renoncer à exercer une action en réduction dans une succession non ouverte. Cette renonciation doit être faite au profit d’une ou de plusieurs personnes déterminées. La renonciation n’engage le renonçant que du jour où elle a été acceptée par celui dont il a vocation à hériter.

La renonciation peut viser une atteinte portant sur la totalité de la réserve ou sur une fraction seulement. Elle peut également ne viser que la réduction d’une libéralité portant sur un bien déterminé.

L’acte de renonciation ne peut créer d’obligations à la charge de celui dont on a vocation à hériter ou être conditionné à un acte émanant de ce dernier. »

 
Fiscalement, la renonciation anticipée à l’action en réduction n’est pas soumise aux droits de mutation à titre gratuite (= droits de succession). Il s’agit d’un acte notarié, signé par deux notaires soumis à un droit fixe de 125€.