Alors que le dispositif fiscal SCELLIER est en train de vivre ses dernières heures, Alors que le DUFLOT s’annonce comme une usine à gaz peu efficace (cf article : Loi DUFLOT : réduction d’impôt et investissement immobilier l’acquisition d’un immeuble en démembrement de propriété apparaît comme un investissement plein de pertinence.

En tant qu’investisseur, vous êtes acquéreur de la Nue propriété de l’appartement et l’usufruit est vendu, sur une durée déterminée, à un organisme de logement social (Usufruit Locatif Social).
Décryptons ensemble cet investissement.

Le principe d’investissement immobilier en démembrement de propriété.

Le principe de l’Usufruit Locatif Social est basé sur la dissociation du droit de propriété, pour une durée contractuelle de 15 à 20 ans, entre le droit d’usage (l’usufruit) et le droit portant sur le patrimoine (la nue-propriété) : un bailleur social achète en bloc l’usufruit de l’immeuble alors que des épargnants se portent acquéreurs de la nue-propriété, appartement par appartement.
Les locataires sont désignés par les procédures habituelles d’attributions des logements sociaux (les bailleurs sociaux louent les logements à des ménages sous conditions de ressources, moyennant des loyers sociaux ou intermédiaires).
Les épargnants se portent acquéreurs de la nue-propriété, lot par lot.
Ils accèdent à un patrimoine immobilier en nue propriété pour un prix compris entre 55% et 60% de sa valeur en pleine propriété.
En contrepartie, ils ne perçoivent aucun revenu pendant la période d’usufruit locatif. Ils retrouvent leur logement en fin d’usufruit en bon état d’entretien et libre de toute occupation.
Ainsi, l’investisseur acquiert la nue propriété d’un bien immobilier pour 55% à 60% de sa valeur, le bailleur social loue ces logements à des locataires répondant aux critères d’attributions des logements sociaux.
Le nu propriétaire ne perçoit aucun revenu pendant toute la durée du démembrement de propriété. Il a simplement la certitude de devenir plein propriétaire d’un appartement au terme du démembrement (15 ans à 20 ans). La décote de 40% à 45% correspond simplement à la valeur capitalisé des loyers que le nu propriétaire laisse à l’usufruitier.
Durant la période de démembrement de propriété, l’investisseur en nue propriété a la possibilité de déduire les intérêts d’emprunt de ses autres revenus fonciers (cf article : Nue propriété d’un bien immobilier : Les conséquences fiscales …).
Aussi, le nu propriétaire n’aura pas à déclarer son bien lors de sa déclaration d’ISF mais, depuis la loi de finance pour 2013, le crédit ne sera plus déductible au titre du passif d’ISF.



L’analyse économique du démembrement.

L’investisseur de la nue propriété recherche avant tout, non pas le rendement de l’immobilier, mais une plus value sur son bien. L’investisseur en nue propriété tirera le gain de son opération dans la valorisation de son immeuble au terme de la période de démembrement. 
En effet, en achetant la nue propriété 55% à 60% de la valeur de la pleine propriété, l’investisseur à la certitude de retrouver la pleine propriété du bien au terme de l’usufruit  (Soit 100% du prix de l’immeuble) à laquelle il convient d’ajouter la revalorisation de l’actif immobilier (plus value immobilière) ou de soustraire la baisse du prix de l’immobilier. 
Dans un marché stable, le gain, c’est à dire la valeur de l’usufruit qui s’éteint, est compris entre 67% et 82% de la valeur de la nue propriété. 
Exemple du calcul / Pour un prix de l’immeuble en pleine propriété de 100 000€. Prix d’achat de la nue propriété = 55 000€ ; valeur de l’immeuble au terme de 18 ans de démembrement = 100 000€.
Gain : 100 000€ – 550000€ = 45000€ = + 81% sur 18 ans ; soit + 3,35% par ans pendant 18 ans (hors évolution des prix de l’immobilier). Explication du calcul : Pour un bien d’une valeur de 100000€, dont la nue propriété est acquise pour 55 000€. Au terme des 15 ans de démembrement, le nu propriétaire devient plein propriétaire d’un bien valorisé 100 000€
(Hypothèse de marché de l’immobilier stable – PS : je vous rappelle mon dernier article : Quelles perspectives pour les prix de l’immobilier ?
Rendement proposé n’est pas à la hauteur, ni de la durée d’immobilisation (entre 15 et 20 ans), ni du risque pris lorsque l’on investi dans un bien immobilier.


Se porter propriétaire d’un bien immobilier immobilisé pendant 15 ans, ne générant aucun revenu complémentaire, et finalement obtenir un rendement trop peu supérieur au niveau de l’inflation ne me semble peu attrayant.
Seule une revalorisation de la valeur de l’immeuble pourrait donner de l’intérêt à ce montage. Le  gain devient dès lors très spéculatif et peu raisonnable :  Nous considérons que le marché de l’immobilier est en situation de « Bulle immobilière », et que les perspectives de moins values sont plus importantes que les perspectives de plus values (CF article : Baisse des prix de l’immobilier : Ces experts qui nous mentent ! (ou qui sont incompétents ? )
Pour espérer s’enrichir davantage, il faut compter sur une valorisation du bien immobilier sur la période ou acheter la nue propriété à un prix raisonnable.
Au terme des 15 ans de détention de la nue propriété, le nu propriétaire devient propriétaire bailleur d’un bien immobilier de 15 ans. Les charges d’entretiens, de réparation risque de limiter d’autant le rendement locatif potentiel de cet appartement. 
Prenons l’exemple concret de la proposition reçue dans ma messagerie internet :

 
 

Quid du mode de calcul de la valeur de la Nue Propriété.

Lors de l’analyse économique et financière de ce montage, il est essentiel de porter la plus grande attention sur la valorisation de la nue propriété. Mais rassurez vous, le mode de détermination de la valeur de la  nue propriété est relativement simple à comprendre et vous confirmera même si vous faites ou non une bonne opération.

L’usufruit est un droit civil qui permet de jouir de la chose comme son véritable propriétaire, mais à charge d’en conserver la substance. Bref, l’usufruit permet à l’usufruitier de mettre l’immeuble en location et d’en percevoir les revenus pendant toute la durée du démembrement.

Ainsi, la valeur de l’usufruit est une valeur de jouissance qui n’est que la valeur actualisée des revenus futurs générés par le bien. (La valeur de l’usufruit est la somme des revenus futurs générés par le bien). Les variables nécessaires à la détermination de la valeur de l’usufruit sont donc :
  • La valeur du bien en pleine propriété.
  • Le taux de rendement locatif du bien.
  • L’estimation de revalorisation des loyers pendant la durée du démembrement. (La revalorisation des loyers vient augmenter le droit de jouissance de l’usufruitier et doit être valorisé).
  • L’estimation de la revalorisation du bien immobilier pendant toute la durée du démembrement.
Ainsi, lorsque l’on retrouve toutes ces données, il devient aisé de comprendre la qualité intrinsèque du bien immobilier et les perspectives de gains futurs pour l’investisseur.
Dans mon exemple, la nue propriété est valorisée 58% de la valeur de la pleine propriété pour un démembrement de 16 ans.
Après de nombreux calculs, on s’aperçoit que la base de travail pour la détermination de la valeur de la nue propriété est :
  • La valeur du bien en pleine propriété : 6060€/m² HP
  • Le taux de rendement locatif du bien : 3,50%
  • L’estimation de revalorisation des loyers pendant la durée du démembrement. (La revalorisation des loyers vient augmenter le droit de jouissance de l’usufruitier et doit être valorisé) : 0%
  • L’estimation de la revalorisation du bien immobilier pendant toute la durée du démembrement : 0%.
Ainsi, vous êtes en train de vous porter acquéreur d’un bien immobilier dont les promoteurs et bailleurs sociaux estiment que le rendement locatif est de 3,50%, que le loyer n’augmentera pas pendant toute la durée des 15 ans et dont la valeur sera identique au terme des 15 ans.

Personnellement, je ne vois pas l’intérêt d’une telle acquisition !! Le rendement espéré doit être supérieur sur un livret A. Et ce n’est pas moi qui l’affirme, puisque c’est le promoteur, dans son calcul de la valeur de la nue propriété qui nous donne la réponse.
Il est clair que le montage juridique est très intéressant mais les prix de l’immobilier et surtout leurs perspectives de baissent dans un contexte d’éclatement de la bulle immobilière, rend cet investissement peu pertinent.

 

Peut être alors que la nue propriété est surévaluée et vendue trop chère ?

Pour ce faire une idée, nous allons valoriser la nue propriété du bien qui aurait les caractéristiques suivantes :
  • La valeur du bien en pleine propriété : 6060€/m² HP

 

  • Le taux de rendement locatif du bien : 4,5% (rendement locatif moyen du marché actuellement)

 

  • L’estimation de revalorisation des loyers pendant la durée du démembrement. (La revalorisation des loyers vient augmenter le droit de jouissance de l’usufruitier et doit être valorisé) : 1,5% (Avec une inflation cible à 2% par la BCE, vous conviendrez que cet objectif doit pouvoir être atteint).

 

  • L’estimation de la revalorisation du bien immobilier pendant toute la durée du démembrement : 0% (par prudence, parce que j’estime que le marché immobilier est dans une bulle immobilière, nous considérons uns stabilité sur 15 ans).
Pour un bien qui aurait ces caractéristiques ( plus proche des valeurs du marché de l’immobilier), la valeur de la nue propriété (formule mathématique complexe identique au précédent calcul) serait de : 46% de la valeur de la pleine propriété, soit 20% de moins que la valeur déterminée par la promoteur (58%) . (et même à ce prix là, le marché de l’immobilier restant sur côté, je ne conseillerais pas l’achat).

 
 

Décrypter le calcul de la valeur de l’usufruit et de la nue propriété pour comprendre la pertinence du montage.

Vous l’aurez compris, il devient essentiel de comprendre les hypothèses retenues par le promoteur pour tirer des conclusions sur la pertinence de cet investissement.
Nous vous proposons donc d’utiliser notre simulateur de calcul de l’usufruit économique pour déterminer les hypothèses retenues.
 

 
 
A suivre.
 
 
Ps : article publié pour la première fois en Janvier 2011.