On le sait, certains auteurs considèrent que les donations de parts de SCPI peuvent être consenties par simple acte sous seing privé ou par don manuel en toute légalité et toute sécurité.
Or, il n’en est rien, d’où l’importance de rappeler l’incroyable danger des dons manuels ou sous seings privés de parts de SCPI.
 

Pourquoi est-il vivement déconseillé de consentir une donation de parts de SCPI par acte sous seing privé ?

Les Tribunaux l’ont rappelé à plusieurs reprises : de telles donations sont entachées de nullité. Pour comprendre cette position jurisprudentielle, revenons en aux fondamentaux du droit des libéralités, et notamment aux articles 931 et 1865 du Code civil.
 
Considérons tout d’abord à l’article 931 du Code civil qui dispose que « Tous actes portant donation entre vifs seront passés devant notaires, dans la forme ordinaire des contrats ; et il en restera minute, sous peine de nullité« .
Puis, l’article 1865 selon lequel « La cession de parts sociales doit être constatée par écrit. Cette cession est rendue opposable à la société dans les formes prévues à l’article 1690 ou, si les statuts le stipulent, par transfert sur les registres de la société. Elle (la cession) n’est opposable aux tiers qu’après l’accomplissement de ces formalités et après publication ».
 
Ainsi, même si les services de l’État acceptent l’enregistrement sous le régime des dons manuels des actes sous seing privé constatant le transfert sans contrepartie de parts de sociétés autres que des valeurs mobilières, cet enregistrement ne permet pas de préjuger de la nature de l’acte, ni du respect de ses conditions de validité.
 
L’examen de la jurisprudence relative à l’exigence légale d’un écrit constant la cession de parts sociales, et notamment de l’arrêt du 18 juin 1996, rendu par la Cour d’appel de Paris, montre que l’inscription d’une cession de parts sociales de société civile, par transfert sur les registres sociaux, éventuellement prévue par les statuts permet seulement de rendre la cession opposable à la société en évitant une signification ou un acte notarié, mais ne constitue pas un mode de preuve de la réalité de la cession qui doit être constatée dans un acte écrit, acte qui, compte tenu de tout ce qui précède, et comme il a été précédemment indiqué, ne peut en l’espèce, n’être qu’un acte notarié (C.A, Paris, 18 juin 1996).
 
Il ne faut donc pas être « induit en erreur » par la conception très large que l’Administration fiscale retient du don manuel.
Il ne faut pas davantage être « induit en erreur » par la portée de l’enregistrement de l’acte, ou par le fait que le transfert sur les registres sociaux rend celui-ci opposable à la société.
 
Car, ni l’assimilation de l’acte à un don manuel, ni son enregistrement, ni encore son opposabilité à la société ne garantissent sa régularité, autrement dit sa validité et sa validité aux exigences définies par l’article 931 du Code civil.
 
La conception de l’Administration fiscale conduit en effet à tort les praticiens, à assimiler au régime des dons manuels soumis à enregistrement, les transferts à titre gratuit d’un titre quelconque, parts sociales ou actions, et les laisse croire que de telles dons enregistrés et rendus opposables à la société par transfert sur les registres, échappent aux exigences de l’articles 931 du code civil, ce que ne dit nullement l’Administration fiscale.
L’Administration ne donne, en réalité, aucun gage en enregistrant les actes qui lui sont présentés, sur leur légalité et leur régularité.
Elle ne valide donc aucune exclusion du champ d’application de l’article 931 du Code civil et ne remet pas en cause les exigences de cet article dont la portée est juridique et non fiscale.
L’Administration n’étant pas juge de la légalité des conventions qu’elle enregistre, un acte enregistré peut tout à fait, encourir la nullité, voir être nul de plein droit lorsque le défaut qui l’entache est d’ordre public. Tel est selon nous le cas lorsque d’une donation n’est pas revêtue de la forme authentique.
 
Précision que l’annulation judiciaire d’une donation taxée obligera l’administration à restituer les droits perçus, l’enregistrement ne permettant jamais à lui seul de « sauver » un acte en réparant le vice qui l’entache.
 
Ceci étant précisé, il apparaît bien évident qu’un tel « procédé » introduit un risque énorme d’instabilité des relations juridiques puisque c’est pendant une période longue de trente ans, durée normale de la prescription, que le donataire sera, même ayant payé les droits, à la merci d’une action en nullité de la part de toute personne intéressée.
Cette nullité de plein droit affectera non seulement sa propre acquisition mais encore tous les actes auxquels il aura pu participer aussi bien dans le fonctionnement de la société que sur les titres objets de la libéralité irrégulière.
 
 

Qu’en est il des donations de parts de SCPI consenties par dons manuels avec ou sans pacte adjoint ?

Abordons maintenant les donations réalisées au moyen d’un ordre de mouvement, suivies ou non d’un pacte adjoint entre donateur et donataire.
Une libéralité peut se réaliser par simple ordre de mouvement donné par le parent actionnaire.
Depuis la dématérialisation des valeurs mobilières, les actions sont inscrites en compte et se transmettent par virement qui est une simple écriture comptable.
 
Le virement s’exécute sur la base d’un ordre de mouvement émanant du titulaire du compte. La transmission de titres se matérialise par des inscriptions sur un registre d’ordre de mouvement. L’ordre de mouvement, acte unilatéral, abstrait et neutre, tout en opérant le transfert de propriété des parts ou actions, ne révèle pas la nature onéreuse ou gratuite de ce dernier.
Ainsi, le transfert au nom des enfants, par eux accepté, et manifesté par l’inscription des titres du compte des enfants dans la comptabilité de la société comme conséquence d’un ordre de mouvement, constitue une donation indirecte valable échappant à l’exigence de l’authenticité posée par l’article 931 du Code civil, puisqu’aucun écrit ne constate la donation.
En cas d’écrit, comme nous venons de le voir ci-dessus, celui-ci doit à peine de nullité être authentique.
 
L’acte sous seing privé qui intervient après est un pacte récognitif ou un acte récognitif de la libéralité d’actions sous forme de donation indirecte.
Cet acte de reconnaissance de donation indirecte ne fait que constater une libéralité réalisée antérieurement à l’acte par l’inscription en compte résultant de l’ordre de mouvement accepté et les conditions dans lesquelles celle-ci a été consentie. Il peut dès lors être établi par acte sous seing privé car il ne porte pas en lui-même donation dans le sens de l’article 931 du code civil.
 
Reste que le procédé n’est pas sans dangers et que son opportunité est discutable. D’une part, la neutralité de l’opération peut être remise en cause. D’autre part, les faiblesses du sous seing privé sont bien connues.
 
L’ordre de mouvement ne doit pas révéler le caractère gratuit de l’opération. Sa rédaction maladroite, ou encore les exigences du teneur de compte (depuis la dématérialisation, il doit s’assurer de la sincérité et de la régularité de l’ordre qui lui est donné, sous peine de voir sa responsabilité engagée), peuvent imprégner l’opération d’une cause libérale.
Si le document indique les circonstances qui sont à l’origine de son émission, il y aura donation ostensible et obligation de respecter le formalisme de l’article 931 du Code civil. En somme dès que l’ordre de mouvement n’est pas parfaitement neutre existe un risque de nullité de l’opération.
 
Le pacte adjoint n’est pas lui non plus à l’abri de maladresses de rédaction. débouchant sur le risque d’une annulation sur le fondement de l’article 931 du code civil. C’est qu’il ne faut pas confondre l’acte de reconnaissance de la libéralité avec la libéralité elle-même.
 
Les faiblesses du sous seing privé sont donc évidentes.
D’une part sa conservation n’est pas assurée (sujet à égarement ou destruction malencontreuse ou frauduleuse, or en matière de libéralité la conservation doit être assurée plus longtemps que d’ordinaire en raison du règlement successoral à intervenir), et se trouve davantage menacée par les convoitises familiales.
D’autre part, le contenu du sous seing privé peut se révéler insuffisant s’il n’est pas rédigé par un spécialiste compétent du droit de la famille. D’où en germe un contentieux de la preuve et de l’interprétation.
 
 
En conclusion, les avantages de l’acte notarié sont nombreux. Sa forme à l’abri de toute remise en question, sa force probante, une conservation absolue résultant de l’authenticité, sa solidité et son efficacité, un contenu à la hauteur de la complexité de l’opération, et enfin la possibilité de délivrer un titre exécutoire (par exemple en cas de donation avec paiement d’une soulte).
Pour finir, seront nulles toutes les donations de parts de SCPI consenties par acte sous seing privé. Seuls seront valables les donations constatées par acte authentique, ou par simple tradition (ordre de mouvement ne portant aucune intention libérale), avec ou sans pacte adjoint (lui-même neutre insusceptible de montrer la moindre intention libérale).
 
 
Ajout de Guillaume FONTENEAU, le 31-03-2014 : Cet article est un droit de réponse suite à la publication d’un article, dont le contenu avait « surpris » de nombreux lecteurs. Cet article avait pour titre : « Donation de parts de SCPI : Don manuel ou acte notarié ?.

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