Un article proposé par Julien Bonnetouche.

Allons-nous vers une crise immobilière d’un nouveau type en France ?

Nous ne sommes pas aux USA, les taux de crédits sont fixes, on n’emprunte pas au-delà de 30 % de ses revenus, ce qui fait dire aux commentateurs qu’une crise du type de celle des subprimes avec défaut de remboursement des emprunts est impossible dans notre pays.

Heureusement  !  Car la plupart des grandes crises boursières débutent en général par une crise immobilière.

Nous voyons cependant que se dessine un tableau dans lequel le logement se trouve en difficultés à tous les étages.

Le président Macron n’aime pas l’immobilier, il le considère comme une rente, et depuis le début de sa mandature, non seulement il ne le soutient pas, mais va plutôt à l’encontre de l’envie des Français qui eux privilégient l’immobilier comme placement, voire le considèrent comme une sorte de Graal à atteindre pour ceux qui ne sont pas encore propriétaires.

Ce n’est pas sans danger politique.

On peut comprendre sa motivation qu’est l’orientation des capitaux vers l’entreprise plutôt que vers la pierre.

Mais c’était sans compter l’accumulation des crises, et l’addition des contraintes qui pèsent maintenant sur l’immobilier.

L’immobilier neuf est actuellement le secteur le plus touché :

  • La légende urbaine dit que les maires renâclent à délivrer les permis de construire pour des raisons électorales (un maire qui bâti est un maire battu, dit-on), mais la suppression de la taxe d’habitation en coupant une bonne partie des recettes réduit d’autant la possibilité des travaux d’infrastructures indispensables ; Pour autant, quelle est la part de vérité dans cette légende urbaine ? Quel serait l’intérêt d’un maire à freiner le développement de sa ville ? Les maires sont rarement attachés à la politique nationale, ils sont ancrés dans leur ville et ont à cœur de participer à leur croissance !
  • Et de toute façon, les terrains à bâtir déjà en pénurie se réduisent encore avec la loi contre l’artificialisation des sols. Probablement, avons-nous là un sujet majeur : Les maires n’ont plus le droit de délivrer des permis de construire ! Nous nous sommes engagés fermement vers l’interdiction de créer de nouveaux lotissements en périphérie des villes. Si on ne fait plus de lotissement, comment voulez-vous construire de nouveaux logements ? Les Français ne veulent pas vivre en appartement, ils veulent vivre en maison !
  • L’empilement des normes, facteur de complexité et de surcoût, est aussi un frein puissant.

Mais à ces problèmes connus, sont venus s’ajouter depuis quelques mois l’inflation des prix des matériaux, dont certains ont doublé depuis 1 an, l’augmentation des taux des prêts bancaires avec lesquels les promoteurs financent les constructions, et maintenant la réduction de la solvabilité des acquéreurs, qui sont pris en tenaille entre l’augmentation des coûts du crédit d’une part, et l’augmentation de leurs autres dépenses contraintes et alimentaires d’autre part.

Les faillites des promoteurs augmentent de jour en jour (et les épargnants qui se sont lancé dans le crowdfunding immobilier doivent craindre les prochains mois – Crowdfunding immobilier : Forte augmentation des retards de paiement depuis le début de l’année 2023).

Et au-delà des promoteurs, ce sont les entreprises du bâtiment qui travaillaient dans la construction des logements neufs qui sont désormais en péril. Certaines d’entre elles se mettent sur le créneau de la rénovation, mais cela demande du temps, une adaptation, de la formation et une taille de marché adaptée.

Néanmoins, le chantier de la rénovation énergétique des logements est tel que l’on ne doit pas craindre le chômage de masse dans le bâtiment. Les futurs chômeurs de la construction de logement neuf devraient rapidement retrouver un emploi chez les électriciens, les chauffagistes, les plaquistes, les carreleurs…, le boulot de manque pas dans la rénovation !

L’immobilier neuf vient de voir baisser le nombre de logements construits de plus de  30 % en quelques mois, et ce n’est que le début semble-t-il.

Les chantiers sont à l’arrêt.

Qui croît sérieusement que l’on peut avoir pour ambition d’envisager la décarbonation de notre économie en construisant toujours plus de logements alors même qu’il ne manque pas réellement de logement en France et que le nombre de logements vacants ne cesse d’augmenter !

L’enjeu, c’est la rénovation de l’ancien et la décentralisation de l’économie ! (cf. « Emmanuel Macron veut faire « baisser les prix [de l’immobilier], parce que la crise du logement se situe là »« )

L’immobilier ancien voit aussi chuter le nombre de transactions, tous secteurs confondus, la première cause étant l’augmentation des taux de crédit.

Rien d’anormal, les volumes de transactions des années 2020/2022 étaient historiquement élevés ! Nous étions dans une bulle liée à des taux très bas pendant trop longtemps ; Il est normal que la hausse considérable des taux ait pour conséquence la chute considérable du nombre des transactions.

Qui s’étonne de ce lien de causalité ? pas moi.

Les courtiers en crédit immobilier et les agents immobilier souffrent d’autant plus que leur nombre avait considérablement augmenté depuis quelques années. On ne compte plus les reconversions d’ancien banquier dans les métiers du courtage en crédit immobilier.

Beaucoup doivent aujourd’hui le regretter. Nombreux sont ceux qui vont devoir trouver un nouveau travail ;

Encore une fois, pas de catastrophisme. Nous sommes dans une situation de quasi plein emploi dans ces professions intermédiaires diplômés. Ils retrouveront du travail sans difficulté ou presque après une formation.

Ils seront beaucoup plus utiles dans les métiers de l’industrie ou de l’énergie renouvelable. Le manque de main d’œuvre est quasi-général ! Les chômeurs de l’immobilier vont rebondir après cette période délicate. C’est difficile, évidemment, mais pas de catastrophisme, on manque de bras !

Trop d’emplois ont été captés par la bulle immobilière ; Il faut que ses emplois retournent dans la sphère productive et l’industrie. La réindustrialisation suppose d’avoir des salariés dans l’industrie ; En période de plein emploi, il faut les prendre dans d’autres secteurs.

Le marché des résidences principales résiste encore par nécessité, malgré tout les prix baissent plus ou moins selon les villes ; En euros courants, les prix sont stables ou presque, mais c’est en intégrant l’impact de l’inflation que l’on constate la réalité de la baisse des prix de l’immobilier (cf. « Les prix de l’immobilier réels baissent fortement malgré les apparences« ).

Enfin, le marché de l’investissement immobilier locatif est pénalisé par l’obligation de travaux qui pèse sur les propriétaires bailleurs.

Mais ce secteur qui était déjà fragilisé par les contraintes pesant sur les bailleurs que nous connaissons tous très bien ici, et qu’il est trop long de rappeler, est surtout touché par les DPE qui rendent les «passoires thermiques»  interdites à la location, donc difficiles à vendre du fait du coût énorme des travaux qui doivent être effectués par des entreprises agréées si l’on veut les aides étatiques.

On estime le prix de la rénovation thermique à -/+ 800€/m². C’est là un investissement important (mais indispensable) pour les propriétaires bailleurs ; Ceux qui ne le font pas devront accepter de loger des locataires de piètre qualité ou d’accepter une baisse considérable de la valeur de leur patrimoine immobilier.

Les propriétaires bailleurs prennent conscience bien tardivement de l’évolution des normes d’habitabilité, pourtant initiées dès 2007 ! Il y a 15 ans que l’on sait que des obligations de travaux s’imposeront aux passoires thermiques (cf. « Investir dans un bien immobilier, ce n’est pas s’acheter une rente !« )

Une tension locative très forte qui trouve son origine le baby boom des années 2000/2010 ?

Que ce soit le logement social, le logement intermédiaire, et même le logement des centres-villes traditionnellement recherché, l’offre est à la fois réduite, et la demande plus importante depuis l’année dernière.

Les chiffres sont impressionnants : 20 % de demande en plus et environ 20 % d’offres en moins.

Pourquoi une telle augmentation de la demande de location ? Certains font un lien entre chute du nombre de transactions et hausse de la tension locative. Je n’arrive pas à comprendre ce lien.

Je n’arrive pas à construire le lien entre baisse des transactions depuis 6 mois et augmentation considérable de la demande de location. Où étaient ces nouveaux locataires avant ?

Pourquoi la baisse du nombre de transactions aurait-il un impact sur le nombre de nouveaux locataires.

En revanche, la démographie et le sommet du pic de natalité des années 2000 explique le pic du nombre d’étudiants et donc les tensions sur le marché de l’immobilier étudiant. Cela doit pouvoir expliquer la tension sur le marché des petites surfaces, traditionnellement destinés aux étudiants.

Néanmoins, au regard de la chute de la natalité depuis 2010, pas de panique, les tensions vont rapidement baisser ! Il devrait y avoir beaucoup moins d’étudiant à partir 2030 !

Les enfants nés en 2010 auront 20 ans en 2030… Le pic du nombre d’étudiants devrait être autour de 2030.

Selon les prévisions effectuées à partir des résultats du baccalauréat, des choix d’orientation observés à l’entrée de l’enseignement supérieur les années précédentes et des premières informations disponibles sur l’année en cours, les inscriptions à la rentrée 2021 auraient augmenté de 1,6 % sur l’ensemble de l’enseignement supérieur, soit +45 600 étudiants environ.

À la rentrée 2022, le nombre d’inscriptions devrait encore s’accroitre de +33 400 étudiants supplémentaires, soit une augmentation de près de 79 000 étudiants en deux ans. 

Si les effectifs en apprentissage en STS se stabilisent dès 2023 et que les tendances en termes d’orientation et de poursuite d’études des bacheliers se prolongent, l’enseignement supérieur pourrait compter 2,99 millions d’étudiants en 2025 et plus de 3 millions en 2030. 

L’effectif dans l’enseignement supérieur augmenterait donc de 97 000 étudiants entre 2020 et 2025 (+3,3 %) et de 108 000 étudiants en dix ans (+3,7 %). Cette hausse serait essentiellement le fait de la forte croissance en apprentissage en STS et du dynamisme des écoles de commerce et d’ingénieur.

source : Projections des effectifs dans l’enseignement supérieur pour les rentrées de 2021 à 2030

Quant à la disparition de l’offre locative, pas de panique, les biens vont revenir sur le marché après leur rénovation !

Objectif : Baisse des prix de l’immobilier pour le gouvernement.

Pour le moment, il semble que le gouvernement se satisfasse de la perspective de baisse des prix du m² des logements, envisagée, sinon espérée, au travers de cette crise.

Pour être en adéquation avec la nouvelle donne des taux, les prix de transactions devraient se situer autour de 10% en dessous des prix actuels comme nous vous l’avons détaillé dans cet article « Analyse & perspectives du marché immobilier – Où vont les prix de l’immobilier en 2023/2024 ?« 

C’est ce que réclament aussi les agents immobiliers qui voient leurs chiffres d’affaires en chute libre…

Inutile de préciser que les vendeurs ne sont pas d’accord. La raréfaction de l’offre finira par leur donner raison même s’il y a un peu de flottement quelque temps.

Les vendeurs qui ont le temps, doivent attendre ! Le marché est calme ; il n’y a plus d’acheteur ; Ce n’est clairement pas le moment de mettre votre bien immobilier en vente… si vous pouvez vous le permettre.

Au final, l’éclatement de la bulle immobilière n’est pas une bombe sociale ;

La bombe sociale, ce sont plutôt les niveaux de prix atteint dans certaines villes / métropoles et sur les littoraux !

La bombe sociale, ce sont ceux d’entre vous qui ont pensé qu’il était possible de gagner davantage dans l’immobilier qu’en travaillant ! Ça, c’est une bombe sociale !

L’immobilier doit permettre à chacun de se loger, d’avoir un toit… pas de s’enrichir sans effort. C’est la participation à la vie économique qui doit permettre de s’enrichir ! L’immobilier peut être un support, mais pas un objet de spéculation.

À suivre.

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