Vous n’êtes pas sans savoir que Mario Darghi a annoncé une action forte jeudi dernier, et le plus important est même qu’au delà de l’annonce, La BCE a réussi à surprendre favorablement, en dépit d’attentes élevées, en délivrant non pas certaines mais toutes mesures d’assouplissement ou presque  qui étaient envisagées.
Ces dernières mesures comprennent notamment un taux de dépôt négatif ainsi que des mesures de liquidité et  d’assouplissement du crédit (les « TLTROs », ou opérations ciblées de refinancement de long terme). Selon la note d’analyse du service d’analyse économique du crédit agricole.
Frédéric DUCROZET, service des études économiques du Crédit Agricole poursuit avec cette synthèse (extrait de la note d’analyse « BCE : la totale  » :

« Qui a dit que la BCE allait encore décevoir ? Une  des leçons que l’on peut tirer de la réunion du  5 juin, au-delà des détails techniques souvent  complexes, est que la BCE a donné tort à la  plupart de ses détracteurs. On peut critiquer le  calendrier de ces annonces, mais on ne peut  guère contester la détermination de la BCE à  combattre le mouvement de désinflation actuel,  selon nous. Les observateurs et intervenants de marché auront besoin de temps pour assimiler les conséquences de l’ensemble des  mesures annoncées ce mois-ci, mais l’assouplissement des conditions de crédit  soutiendra très probablement l’économie réelle,  dans la périphérie de la zone  en particulier.
La principale justification des décisions de la BCE – adoptées à l’unanimité, un autre aspect essentiel du « paquet » délivré – est la nouvelle  détérioration des perspectives d’inflation, mise en  évidence par la baisse des prévisions du staff jusqu’en 2016.
 

Le service recherche économique de ODDO sécurities y va également de son titre enthousiaste avec un « Mario Draghi sort son « gros paquet« .
Oddo Sécurities est donc parfaitement dans le même registre que le Crédit Agricole avec ces mots plein d’enthousiasme, inversement proportionnelle à la médiocrité de la situation économique :

Le Conseil des Gouverneurs de la BCE a délivré TOUT (et non seulement une partie) ce qu’il était raisonnable d’espérer : baisse de la  des taux directeurs, extension et assouplissement des procédures de fourniture de liquidité, intensification  du travail préparatoire pour des achats d’ABS. La seule pièce manquante concerne un programme d’achats d’actifs, mais c’est précisément ce qui était exclu puisque cette option est liée à une situation de déflation généralisée, à laquelle la BCE ne croit pas (nous non plus). Dans la série de mesures annoncées, la plus intéressante est celle qui donne aux banques une incitation à accroître leur production de crédit.

 

Le durcissement non justifié des conditions monétaires est un problème identifié depuis plusieurs mois. Le risque de voir le cycle du crédit ne pas repartir après la fin de la procédure d’AQR/stress test est un sujet de préoccupation. De ce fait, tous les outils associés à ces deux risques seront utilisés. Quant au risque déflation, la BCE lui attribue toujours une faible probabilité. En conséquence, la BCE ne s’est pas engagée sur un programme de QE à l’américaine, mais cette option n’est pas définitivement exclue. Il faudrait, pour l’activer, que toutes les nouvelles mesures d’assouplissement se révèlent un échec complet.
Certaines de ces mesures sont largement symboliques, notamment celles qui concernent la baisse des taux (10bp) et la fixation d’un taux négatif sur la facilité de dépôt. La principale innovation dans ce paquet de mesures concerne la création de « targeted LTRO ». Ces opérations sont calibrées de sorte à encourager les banques à répondre à une hausse de la demande de crédit à partir de 2015. Les montants pouvant être empruntées (chaque trimestre de 2015 et du S1 2016) dépendront en effet de la production de nouveaux prêts, ce qui est une manière d’offrir une prime aux banques si elles assurent le financement de l’économie, soit par des prêts à la consommation, soit par des prêts aux entreprises (les prêts immobiliers sont exclus). La BCE attend des effets sur l’économie réelle à un horizon de trois ou quatre trimestres, ce qui dit bien que le véritable horizon visé est 2015, une fois l’AQR achevé.
 
Mario Draghi a dit que ces mesures avaient été décidées à l’unanimité du Conseil de Gouverneurs, ce qui renforce la résolution de la BCE à mener sa stratégie reflationniste. Les prévisions du staff de la BCE montrent en effet que le redressement de l’inflation ne serait que très graduel
 

Enfin, le service de la recherche économique de NATIXIS est plus sobre dans son propos « BCE : Quels effets du Package ? » dans ces mots :

Après plusieurs mois de tergiversations, la BCE est finalement passée à l’acte en délivrant une série de mesures lors de son Conseil des gouverneurs du 5 juin dont l’objectif est de rendre les conditions monétaires plus accommodantes et de faciliter le crédit aux agents privés de façon à atténuer le risque de déflation […]
[…] En combinant toutes les mesures envisagées depuis plusieurs mois excepté l’achat de titres publics (QE), la BCE n’a pas déçu les marchés. Si nousne voulons pas minimiser les mesures prises par la BCE, nous pensons toutefois que les effets sur l’économie réelle devraient rester limités.
Les différentes mesures ont des effets contrastés pour les banques mais globalement positifs. D’un côté, pour celles très dépendantes du financement BCE (Italie, Espagne, Portugal), elles vont leur permettre de se financer moins cher via la baisse du refi (à 0,15%) et celle induite de l’eonia. Les différentes mesures sur la liquidité vont alléger les tensions et donner plus de temps aux banques pour ajuster leurs bilans. Par ailleurs, les TLTRO devraient leur permettre de se financer peu chers (0,25%) à assez long terme (4 ans pour les premiers). De l’autre côté, les banques ayant des liquidités excédentaires vont devoir payer pour les déposer à la BCE avec le passage du taux dépôt et de la rémunération des réserves excédentaires sur le compte courant en territoire négatif (-0,10%).Soit elles utiliseront la liquidité (interbancaire, crédit, achat de titres, dépôt dans d’autres BC,…), soit elles essaieront probablement de répercuter le coût à leurs clients… La liquidité excédentaire se montait à environ 125Md€ début juin, elle devrait augmenter avec l’arrêt de la stérilisation du SMP (effet théorique de 165Md€ mais vraisemblablement plus faible car la BCE ne parvenait pas à tout stériliser depuis début mai (105Md€ le 30 mai).Les effets sur l’économie réelle de ces mesures passent par différents canaux de transmission mais nous pensons que l’impact global sera modeste.

  1. le canal de la confiance avec un effet positif sur les anticipations des agents, notamment les entreprises.
  2. Le canal financier avec le maintien des taux à un niveau plus faible.
  3. le canal du crédit mais il est difficile de dire aujourd’hui quelle en sera l’ampleur : la possibilité pour les banques de venir chercher de la liquidité à 0,25% à partir du mois de septembre, avec une maturité de 4 ans, apparaît évidemment attractive mais il y a plusieurs écueils

Les montants en jeu restent faibles (7% de l’encours de crédit aux agents privés hors logement ce qui représente environ 94Md€ pour l’Allemagne, 77Md€ pour la France et respectivement 75Md€ et 54 Md€ pour l’Italie et l’Espagne). Certes dans un deuxième temps (mars 2015), les banques pourront également venir se refinancer tous les trimestres en fonction des montants de nouveaux crédits octroyés mais la maturité sera plus courte. De plus elles garderont les crédits au bilan ce qui peut constituer un frein dans le contexte des nouvelles réglementations de Bâle 3. Il nous semble toutefois que ces mesures pourraient permettre de mettre un frein à la contraction du crédit dans certains périphériques. L’impact sur l’inflation restera modeste à court terme, avec probablement un léger effet positif via le taux de change mais c’est plutôt l’effet sur l’ancrage des anticipations d’inflation qui pourrait être plus important.
 

 Que retenir ?

  • La banque centrale à fait le job en annonçant une série de mesure et en ne décevant pas les anticipations des marchés ;
  • La force des ces mesures est le fruit d’un risque de déflation qui n’a jamais été aussi présent ;
  • Les conséquences de ces mesures sont encore inconnues, mais quoiqu’il arrive elle vont dans le bon sens ;
  • La relance de la croissance reste bien le cœur de la question … Est ce que la politique monétaire peut seule relancer l’activité ?

 
 

Besoin d'un conseil ? Découvrez nos services :
Conseil indépendant 
Bilan patrimonial
Conférences patrimoniales
Gestion conseillée
Livres et formation 
Assurance-vie et gestion de patrimoine
Investir dans l'immobilier
Optimiser sa Succession

Vous êtes les meilleurs ambassadeurs !

Depuis quelques mois, j'ai mis en place un système d'avis client (indépendant et certifié).
Un client vient de déposer un nouvel avis. C'est grâce à ce genre de commentaires que j'adore mon métier ! #MERCI :