Les situations de démembrement de propriété sont très courantes.
Qu’il s’agisse d’un démembrement subit après le décès d’un des époux ou d’un démembrement voulu au terme d’une donation avec réserve d’usufruit (cf. « La donation avec réserve d’usufruit réversible au profit du conjoint« ), le démembrement est partout. Un démembrement qui porte sur des biens immobiliers, mais également sur des placements ou encore des compte-titres.
Il est tout aussi courant qu’usufruitier et nue-propriétaire veuillent vendre ledit bien démembré. La question est alors de savoir ce qu’il est possible de faire du prix de vente.
L’usufruitier peut-il appréhender l’intégralité du prix de vente ? Faut-il au contraire le répartir entre usufruitier et nu-propriétaire ? Peut-on conserver le démembrement pour le reporter sur un nouvel actif ?
Comme nous allons le voir dans cet article, les trois solutions sont en réalité envisageables. Chacun devra trouver la meilleure solution, celle qui correspond le mieux aux besoins réels de chacune des parties, de l’usufruitier et du ou des nus propriétaires.
Ainsi, trois solutions sont envisageables même si la solution par défaut est le partage du prix de vente entre usufruitier et nu-propriétaire. À défaut d’accord entre ces derniers, c’est le partage qui s’impose.
1 – Le partage du prix de vente entre usufruitier et nu-propriétaire.
Dans cette première hypothèse, le prix de vente sera donc réparti entre usufruitier et nu-propriétaire en fonction de l’âge de l’usufruitier au jour de la vente. Chacun, usufruitier et nu propriétaire, repartira avec un chèque.
Le barème de répartition du prix de vente est défini à l’article 669 du CGI.
Ainsi, un usufruitier qui aurait 62 ans repartirait avec 40% du prix de vente. S’il avait 72 ans, il repartirait avec 30%. C’est l’âge de l’usufruitier au jour de la cession qui détermine ce barème de répartition.
2- Le quasi-usufruit
Lorsque usufruitier et nu propriétaire sont d’accord, les deux autres solutions peuvent être envisagées : le quasi-usufruit ou le report du démembrement sur un nouvel actif (bien immobilier ou placement financier).
Le quasi-usufruit, c’est l’application de l’article 587 du code civil.
Si l’usufruit comprend des choses dont on ne peut faire usage sans les consommer, comme l’argent, les grains, les liqueurs, l’usufruitier a le droit de s’en servir, mais à la charge de rendre, à la fin de l’usufruit, soit des choses de même quantité et qualité soit leur valeur estimée à la date de la restitution.
Article 587 code civil
Ainsi, le démembrement d’un bien immobilier, transformé en quasi-usufruit à l’occasion de la cession dudit bien immobilier, permettra à l’usufruitier, devenu quasi-usufruitier, d’appréhender l’intégralité du prix de vente.
Au terme de la vente, seul l’usufruitier touchera l’argent de la vente. Il pourra le déposer sur un compte bancaire ouvert à son nom et pourra en faire ce qu’il veut. Il n’aura aucun compte à rendre aux nu-propriétaires.
Ces derniers disposeront d’une créance sur le patrimoine de l’usufruitier (l’usufruitier aura donc une dette vis-à-vis des nus propriétaires). Une créance dont ils pourront exiger le remboursement au décès de l’usufruitier, et pas avant.
Pour sécuriser la réalité de cette créance, les parties devront rédiger une convention de quasi-usufruit.
Cette convention de quasi-usufruit permettra de fixer le montant de cette créance, son éventuelle indexation, les éventuelles garanties exigées par les nu-propriétaires et les éventuelles limites à l’utilisation des fonds par l’usufruitier (cf. « La convention de quasi-usufruit est-elle obligatoire après une succession pour enregistrer le démembrement sur les placements ? » ou encore « Le quasi-usufruit, de la convention de quasi-usufruit à l’indexation de la créance de restitution« )
3 – Le report du démembrement sur un nouvel actif.
Enfin, les parties, toujours d’un commun accord, pourront prendre la décision de vendre ledit bien démembré puis de réutiliser ce prix de vente pour se porter acquéreur d’un nouvel actif qui sera à son tour démembré.
Il s’agit tout simplement de reporter le démembrement sur un nouvel actif. Il pourra s’agir d’un nouveau bien immobilier ou même d’un placement avantageusement souscrit en démembrement. Classiquement un contrat de capitalisation ou des parts de SCPI.
Bien évidemment, il est possible de faire un mix des trois solutions 😉
À suivre…