Je reprends cette expression comme un clin d’œil à mon précédent article sur «l’euthanasie des épargnants» et le probable statut quo des taux autour de zéro pendant plusieurs années encore.
Nous n’avons pas encore la certitude que si le temps vaut zéro, la valeur des actifs tende vers l’infini, mais l’actualité devrait nous faire prendre conscience d’un fait nouveau : Le prix du temps devient en matière technologique, inversement proportionnel à sa durée.
Avez vous remarqué que nous sommes toujours en retard sur tout ?
En retard sur les tests, sur les vaccins, sur la recherche, sur le plan de relance européen… j’arrête là pour ne pas vous démoraliser. Et d’une manière générale en retard d’un train sur les américains.
Mais cela, ce n’est pas nouveau, déjà en 1936 nous préparions la guerre de 14…
Tout ça crève les yeux.
Le 11 décembre dernier, en regardant sur BFM TV l’émission semi-humoristique de Marc Fiorentino, (c’est votre argent) dans laquelle le sujet abordé était celui d’une éventuelle bulle boursière, (sujet récurent) l’un des gérants- intervenant (par ailleurs de talent) a retenu mon attention par ses propos sur la valorisation extrême des GAFAM.
«je ne comprends pas ces valorisations, et si je ne comprends pas je m’abstiens, je suis un «ringard» et je préfère donc investir sur les actions européennes» disait il grosso modo.
Je crois que cet homme encore jeune et sympathique, résumait à lui seul, la quasi totalité des problèmes français et européens d’adaptation au monde nouveau dans lequel nous sommes entrés avec ce siècle.
Et surtout, pourquoi nous européens, nous n’avons pas de GAFAM.
La spécificité des succès fulgurants de ces nouvelles industries tient en deux concepts maintenant bien établis, mais semble t il encore trop ignorés des entrepreneurs et surtout des États européens :
- L’innovation de rupture
- Le management horizontal.
Qui s’opposent à :
- L’évolution incrémentale
- Le management vertical
L’affaire des vaccins anti-covid , que tout le monde commence à bien connaître, en est une illustration frappante.
Les coronavirus (qui donnent les rhumes la plupart du temps), sont depuis longtemps un casse tête pour les laboratoires qui fabriquent les vaccins. Leurs mutations, la multiplicité des organes cibles, n’ont pas permis dans le passé, de faire des vaccins à l’efficacité durable par les méthodes classiques, issues de techniques utilisées depuis quasiment les premiers vaccins.
C’est pourtant cette voie qui a été choisie par la France, SANOFI et surtout l’institut PASTEUR, longtemps emblème du rayonnement français dans le monde, dont on peut légitimement s’étonner qu’il ne soit pas en pointe dans ce domaine.
Sans entrer dans les détails, ce dernier avait décidé de coupler le virus covid au virus de la rougeole, et d’en faire un virus vivant atténué qui ne serait pas disponible avant un an au mieux, et dont l’efficacité resterait de toutes façons incertaine.
D’ailleurs nous avons appris en décembre que celui de Sanofi sera retardé pour cette raison, et aux dernières nouvelles Pasteur à carrément jeté l’éponge pour le sien.
Sanofi va maintenant faire office de soustraitant pour Pfizer. C’est mieux que rien, mais quelle gloire !!
Pasteur a certainement bien fait de renoncer, puisque comme prévu des mutants apparaissent et son vaccin aurait rapidement été inopérant.
Pasteur et Sanofi utilisent des technique d’évolution incrémentales d’amélioration de méthodes pré-existantes. Au delà de la technique, les hommes qui les dirigent n’ont pas su faire évoluer leurs structures mentales pour les adapter à la modernité.
A l’inverse, MODERNA et PFIZER utilisent une technologie de rupture : l’ARN messager.
Il faut dire que Moderna et BioNtech, étaient en avance sur cette technologie avec laquelle ils comptent traiter certains cancers, et n’ont fait qu’utiliser leur savoir faire pour l’appliquer à la covid.
Les thérapies par l’ARN messager sont issues de bio-technologies de pointe, ce qui leur a permis de fabriquer le vaccin dans des délais incroyablement courts.
La réalisation est extrêmement complexe, faisant appel aux nanotechnologies, mais tout passe par des codes informatiques et des matières premières chimiques, (essentiellement 4 bases nucléiques, l’adénine, la guanine la cytosine et l’Uracile) pas besoin de virus, tant et si bien qu’en cas de mutation importante du virus, quelques semaines seront suffisantes pour refaire un nouvel ARN-vaccin mieux adapté.
Je crois savoir qu’ils ont déjà commencé sur les variants sud africains et brésiliens.
On ne connaît pas encore la durée d’efficacité des ces nouveaux vaccins mais il s’agit d’une course contre la montre, et plus tôt nous aurons vacciné une grande partie de la population, quitte à faire plusieurs rappels, plus vite l’activité économique pourra reprendre normalement, il s’agit là d’un point fondamental.
50 ans en arrière, Michel Sardou chantait «si les ricains n’étaient pas là».
En 2020 peu de choses ont changé sur ce point : sans eux, nous serions au fond du gouffre, sans espoir de s’en sortir rapidement.
Pour être tout à fait juste, le vaccin de Pfizer-BioNtech, est dû à deux turcs travaillant en Allemagne, et Moderna est dirigé par un français, ancien de chez Mérieux,( Stéphane Bancel) et qui a compris que son avenir professionnel serait meilleur aux USA.
Ils sont donc le produit de la mondialisation, avec des savants qui se délocalisent vers des eaux plus attirantes.
Bizarre, ils ne viennent que rarement en France, excepté pour les vacances….
Il faut le dire, Moderna et Pfizer ont réussi à trouver deux à trois milliard $ chacun pour développer leur vaccin. Chez nous quand on arrive à trouver 20 millions c’est le bout du monde…..
Il y a des raisons à cela : en France on n’aime pas l’argent !! Et à force, il finit par manquer !!
Récemment Stéphane Bancel l’a cruellement expliqué : L’Union Européenne a décliné sa demande de l’aider dans le développement du vaccin, et a préféré en marchander le prix une fois qu’il serait au point !!
Or nous pouvons facilement estimer aujourd’hui, à la louche qu’un vaccin à 500€ la dose disponible immédiatement serait plus économique que les aides de la BCE.
Nous manquons d’investissements public et privé, y compris pour la recherche fondamentale !!! Cela doit changer.
On se plaint des GAFAM et de leur position dominante comme si c’était déloyal, mais nous ferions mieux de nous regarder dans une glace. Afin de cerner une (petite) partie des handicaps de l’économie européenne et française, je développerai dans le chapitre suivant les notions, déjà citées, de :
- Innovation de rupture
- Évolution incrémentale
- Management horizontal
- Management vertical
A suivre…
Merci Julien de partager cette analyse intéressante. Essayons de voir le verre à moitié plein : Cette prise de conscience violente n’est il pas la meilleure nouvelle depuis longtemps. Pour résoudre un problème, il faut en avoir conscience.
Regardez le pouvoir de l’initiative personnelle : Guillaume Rozier, M. CovidTracker, le data scientist le plus médiatisé du moment https://start.lesechos.fr/innovations-startups/portraits-innovateurs/guillaume-rozier-m-covidtracker-le-data-scientist-le-plus-mediatise-du-moment-1278100
Un jeune homme, tout seul, construit un site de suivi de l’évolution du COVID alors qu’il aurait probablement fallu des millions d’euros et de nombreux fonctionnaires pour construire un outil aussi efficace.
Avis partagé .
Bien vu sur l exemple de la recherche dans le domaine des vaccins .
Katalin Kariko biochimiste a préferé emigrer aux USA pour sa recherche sur l ARN messager ….
le livre de stephane mallard « Disruption » explique et illustre très bien le propos relatif au management horizontal et l inovation de rupture .C est très inconfortable !
Je n’en revenais pas quand j’ai lu ça ce matin: « Valneva, développe un vaccin contre le Covid, manque de bol, elle est financée par la Grande-Bretagne qui s’est réservée les 100 premiers millions de doses produites »
Précision qui donne tout son sens au commentaire que j’ai fait: « Valneva SE est une société de biotechnologies française, basée à Saint-Herblain dans la banlieue ouest de Nantes, spécialisée dans les vaccins contre les maladies engendrant des besoins médicaux importants et non satisfaits. Elle commercialise deux vaccins du voyage »
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Excellente analyse pertinente et… »disruptive ».
L’Innovation de rupture est effectivement un phénomène qui se reproduisait tous les demi siècles et internet en est probablement la dernière manifestation la plus significative.
Aujourd’hui , comme une boule de neige préfigurant une avalanche, ce phénomène risque de s’amplifier considérablement à la fois dans son rythme et ses applications via la physique quantique, l’évolution quasi exponentielle d’internet….
Ce gouvernement, que tout le monde critique pour sa gestion de la crise sanitaire (que tout à chacun aurait naturellement infiniment mieux géré……) est néanmoins le premier, via son Président, à s’impliquer aussi fortement dans cette innovation technologique dont le succès ne peut naturellement que s’imaginer à l’échelle européenne car elle implique des financements et une alliance public-privée elle aussi disruptive!
Difficile néanmoins de mettre en œuvre à tous les échelons de notre vie sociale, sanitaire, économique, éducative etc….cette culture de l’innovation de rupture lorsque l’on constate que la moindre volonté politique de changement se heurte immédiatement à l’hostilité d’une large fraction de notre société et des milliers de manifestants chaque samedi dans nos rues.
Je doute qu’il puisse exister dans un pays des îlots persistant d’innovation en capacité de développer des solutions disruptives à l’échelle de notre planète alors qu’ils sont immergés dans une culture attachée aux droits acquis pour soi et au mépris de l’argent des autres.
L’innovation que l’on appelle « de rupture » est celle qui fait évoluer le monde de manière significative. L’Europe (et pas que) est à la traîne car elle a notamment laissé se dégrader son système éducatif. Comme beaucoup commencent à le dire, nous avons besoin d’une révolution qui nous débarrasserait de toutes ces idéologies marxisantes qui nous ruinent.
Bravo!
Analyse que je partage totalement.
Mais comment faire bouger les lignes. On ne peut pas perdre toutes les guerres ou alors on se vassalise!
Il faut regarder à l’ouest, vers la liberté.
On est d’accord sur le fait que tous nos inventeurs de génie vont se faire financer ailleurs, ce n’est pas nouveau depuis 40 ans mais cela est désormais plus.. apparent.
« France , terre de loisirs mais surtout pas d’entreprenariat destiné à grandir…. »
Nous inventâmes le minitel, la carte à puce, etc et on universalise internet sous bannière US
Donc rien de nouveau sous le soleil, hélas, les vieux démons ont le cuir dur, et les structures fossilisées, les mentaux avec, ne veulent pas mourir.
Globalement le management vertical a certes vécu, malgré des larges poches de résistance, mais les limites de l’horizontal tendent à poindre leur nez, demandez aux salariés déçus des start up.. la vérité est peut être au milieu, voire à d’autres formes à inventer .
Ceci étant, l’exemple du vaccin ARN dont Juju nous vante la rapidité d’élaboration et d’adaptation, est tout de même bien mal choisi : les risques de trifouillage du génome à notre corps défendant, voire de recombinaison ne sont pas nuls, en tout cas suffisamment importants au regard des morts déclarés COVID: sur 56, 87 millions de morts mondiaux toutes causes, 1,8 million de covid (source OMS 31/12/2020)=> no comment
On déborde du sujet mais privilégier le renforcement immunitaire en premier lieu, en fait savoir se défendre seul, est préférable à tout vaccin insuffisamment testé, qui devrait intervenir 1) déjà testé 2) en complément du renforcement précité, car il ne faut s’épargner aucune arme.
La course à la rapidité fait oublier les pieds dans le pantalon.
D’ailleurs pour reprendre votre antienne, le « sentiment d’être en retard » est un vrai travail personnel à faire, plutôt que d’y souscrire aveuglément, même si le bruit de fond du mainstream nous y incite délibérément.
Bonjour à tous,
Merci pour vos commentaires.
Pour répondre à Henri Neyrand, « comment faire bouger les lignes » ?
C’est l’objet ( à notre petit niveau) de toute une série d’articles que je propose à Guillaume, et qui ont pour but de comprendre pourquoi nous en sommes là, comment font les autres, et ce qu’il sera possible de faire évoluer en fonction de nos caractéristiques propres, en temps que peuple français très disparate.
Il faudra identifier les énergies positives de notre pays et les libérer.
Mais, en réalité, la crise actuelle est une opportunité sans laquelle rien ne serait possible.
Elle crée en effet à la fois un choc psychologique et une possibilité de financement d’investissement que nous n’aurions jamais pu avoir dans des circonstances normales.
Nous verrons bien si nos dirigeants seront capables de saisir cette chance pour la France.
» la crise actuelle est une opportunité sans laquelle rien ne serait possible » ==> C’est exactement mon sentiment.
en France on est champion du monde des Taxes, Impôts et autres Limitations.. on peut pas être champion sur tout !!
« Avez vous remarqué que nous sommes toujours en retard sur tout ? » On est en retard, c’est possible, mais en retard pour aller où exactement ? Personne n’est même capable de le dire… ( on sera vacciné même si la vaccin n’a pas été trouvé en france, ne vous inquiétez pas ).
Il y a 200 pays, tout le monde ne peut pas être premier, la France compte moins de 1/100 ème de la population mondiale. Des fois, on est premiers, et des fois pas, c’est la vie, et on a pas à se plaindre en France à ce sujet, pourquoi toujours vouloir dévaloriser le pays ? ( on croirait que c’est tellement mieux ailleurs… )
En tout cas, pour ma part, je suis très heureux en France, et je ne quitterai jamais mon magnifique pays envié dans le monde entier, et je ne le dévaloriserai jamais.
. Tout ça me fait penser à toutes ces idiotes compétitions sportives, où il y a un vainqueur heureux et une énorme quantité de frustrés. Il faut RELATIVISER … 😉
C’est vrai que la France est un pays merveilleux, ce n’est pas pour rien qu’il fait partie des pays du club med et qu’il attire tant de migrants économiques. Mais c’est un pays qui manque d’ambition.
Bravo. Bel Article!
Toutefois, voici le fond de ma pensée :
En France, on ne manque pas d’argent, on l’utilise surtout très mal.
On a pas le bon état d’esprit, et on finit par le payer cash.
Les écarts se creusent et on recule.
Bonsoir,
Beaucoup de frilosité dans les prises de risques qui aboutissent par l’impossibilité de financement local et l’obligation de se vendre à des organismes plus téméraires.
Nous devenons les champions du parapluie aux risques.
Très mauvais exemple que le vaccin ARN messager qui au final va se révéler inefficace du fait de la mutation des virus et pour lequel on a pas fini de constater les effets secondaires. Regardez d’ailleurs ce qui se passe en Israel après la vaccination massive !
Merci pour votre blog, les sujets et analyses que je lis avec intérêt depuis un moment. Vous apportez à la gestion de patrimoine une contribution pertinente et utile à tous.
En matière d’innovation de rupture, la blockchain est certainement une innovation aussi importante que celle d’internet qui en matière de finance et de banque a été depuis plus de 20 ans révolutionnaire. (Nos vieux réseaux bancaires snobaient, méprisaient les nouvelles banques du net innovantes et attrayantes pour le client. Ils nous ont dit pendant le confinement de ne plus venir à l’agence mais d’aller sur leur site. J’ai failli mourir de rire.)
La blockchain a été créée avec l’avènement du bitcoin en 2009, suivi par l’invention de nombreux projets de cryptos. Comme dans toute innovation, comme pour internet, les acteurs du début ne seront peut-être pas tous les acteurs de demain, mais si le cours du bitcoin monte, c’est que les institutionnels commence à rentrer, et que le projet de monnaie décentralisée entre dans les esprits, en apportant fluidité et sécurité avec moins d’intermédiaires et de coûts
Quand les tenants du système monétaire centralisé, qui impriment leur monnaie à tout va sans contrepartie, nous expliquent que le bitcoin, ce n’est pas bien, tout en cherchant à le copier, car il peut servir à des financements occultes, il faut se poser la question :
Avant le bitcoin, les valises de billets n’ont-elles pas existées ? (Alors, faut-il interdire les valises ?)
La vérité est qu’il est difficile d’accepter une innovation de rupture pour ceux qui ont le pouvoir monétaire, pouvoir qui est le plus puissant de tous, avant le médiatique, et les trois pouvoirs législatifs, exécutifs et judiciaires que l’on nous prétend comme théoriquement séparés.