Parce que le scénario de la vie n’est pas toujours simple, les objectifs patrimoniaux poursuivis sont parfois « non conventionnels » et notamment dans le cadre des familles recomposée.

Dans une précédent article, nous vous présentions une stratégie patrimoniale pour mieux protéger le conjoint survivant sans pour autant déshériter les enfants du premier mariage, analysons aujourd’hui une situation plus délicate :
 

Comment déshériter les enfants d’un premier mariage et favoriser le conjoint et les enfants issus d’une nouvelle union ?

Vous le savez, le code civil organise la dévolution successorale et fixe un niveau minimum des droits héréditaires que recevront les enfants et le conjoint survivant.

Cette part minimum d’héritage qui doit être attribuée aux enfants (tous les enfants, enfant commun aux époux mais également les enfants du premier mariage), c’est la réserve héréditaire.

La réserve héréditaire prend sa source dans l’article 912 et suivants du code civil :


La réserve héréditaire est la part des biens et droits successoraux dont la loi assure la dévolution libre de charges à certains héritiers dits réservataires, s’ils sont appelés à la succession et s’ils l’acceptent.

La quotité disponible est la part des biens et droits successoraux qui n’est pas réservée par la loi et dont le défunt a pu disposer librement par des libéralités.

Les libéralités, soit par actes entre vifs, soit par testament, ne pourront excéder (= Quotité disponible) :

– La moitié des biens du disposant, s’il ne laisse à son décès qu’un enfant ;
– Le tiers, s’il laisse deux enfants ;
– Le quart, s’il en laisse trois ou un plus grand nombre.

Les libéralités, par actes entre vifs ou par testament, ne pourront excéder les trois quarts des biens si, à défaut de descendant, le défunt laisse un conjoint survivant, non divorcé.
 
Pourtant, derrière cette théorie de la réserve héréditaire et de la quotité disponible, il est possible de réduire la part d’héritage qui sera finalement transmis aux enfants du premier mariage.
 

L’assurance vie, une solution très efficace pour déshériter les enfants du premier mariage (ou autre d’ailleurs).

La souscription du contrat d’assurance vie est bien évidemment la solution la plus simple et probablement la plus efficace pour contourner le principe de la réserve et de la quotité disponible et donc pour in fine déshériter les enfants (cf »Comment deshériter ses enfants en toute légalité ?« ).

Le dénouement d’un contrat d’assurance vie par le décès du souscripteur assuré est « hors succession » en application de l’article L132-12 du code des assurances. Cela signifie simplement que le capital versé au décès à un bénéficiaire déterminé ne sera pas soumis ni aux règles du rapport à succession, ni à celles de la réduction pour atteinte à la réserve des héritiers du souscripteur assuré du contrat d’assurance vie (cf »Pourquoi l’assurance vie est « Hors succession » ? Quelles sont les exceptions ?« )

Ainsi, en souscrivant un contrat d’assurance vie, le parent qui souhaite déshériter un de ses enfants, pourra réduire la masse à partir de laquelle seront calculés la réserve et la quotité disponible. Ces deux notions civiles ne sont pas totalement supprimées mais les montants investis dans les contrats d’assurance vie réduisent d’autant leur montant.

En effet, pour déterminer le montant de la réserve et de la quotité disponible (exprimés en pourcentage du patrimoine), il convient, au terme de l’article 922 du code civil, de former une masse sur laquelle la réserve (1/2 ; 1/3 ou 1/4) pourra être calculée.

Cette masse est formée par :

  • Tous les biens existant au décès du donateur ou testateur ;
  • D’y ajouter les biens dont il a été disposé par donation entre vifs, d’après leur état à l’époque de la donation et leur valeur à l’ouverture de la succession, après qu’en ont été déduites les dettes ou les charges les grevant. Si les biens ont été aliénés, il est tenu compte de leur valeur à l’époque de l’aliénation. S’il y a eu subrogation, il est tenu compte de la valeur des nouveaux biens au jour de l’ouverture de la succession, d’après leur état à l’époque de l’acquisition. Toutefois, si la dépréciation des nouveaux biens était, en raison de leur nature, inéluctable au jour de leur acquisition, il n’est pas tenu compte de la subrogation ;

On calcule sur tous ces biens, eu égard à la qualité des héritiers qu’il laisse, quelle est la quotité dont le défunt a pu disposer.
 
Ainsi, puisque le contrat d’assurance vie dénoué par le décès du souscripteur ne rentre pas dans masse à partir de laquelle sont calculés réserve et quotité disponible, cette dernière est mécaniquement vidée de sa substance.

Mais attention, seul le contrat d’assurance vie souscrit par le défunt n’intégrera pas cette masse et permettra de contourner la réserve et la quotité disponible. Lorsque les époux sont mariés sous le régime de la communauté légale, le contrat d’assurance vie souscrit avec des fonds communs par le survivant des époux est considéré comme un bien commun et devra rentrer dans le calcul de la réserve et de la quotité disponible en application de la réponse ministérielle CIOT (et PRORIOL).

Pour contourner cette difficulté, les époux mariés devront réaliser une co-souscription dénouement premier décès de leur contrat d’assurance vie (cf »Avec la RM CIOT, L’assurance vie en co-souscription est elle encore intéressante ?« ).
 
 

Mais dans la limite des primes manifestement exagérées au regard des facultés contributives du souscripteur assuré du contrat d’assurance vie.

En application de l’article L132-13 du code des assurances, ces règles ne s’appliquent pas non plus aux sommes versées par le contractant à titre de primes lorsque celles-ci ont été manifestement exagérées eu égard à aux facultés du souscripteur du contrat d’assurance vie (cf »Requalification du contrat d’assurance vie : Peut on investir tout son patrimoine en Assurance vie.« )
 

Adopter un contrat de mariage qui assurera un enrichissement du conjoint (au détriment des enfants du premier mariage).

Attention, je vous arrête tout de suite, il ne sera pas possible de vider la succession par l’adoption d’un contrat de mariage type communauté universelle avec clause d’attribution intégrale de la communauté au survivant des époux. L’article 1527 du code civil limite le recours aux conventions matrimoniales qui auraient pour conséquence de déshériter même partiellement les enfants d’un premier mariage.

L’article 1527 précise en effet l’action en retranchement en ces mots :

« Les avantages que l’un ou l’autre des époux peut retirer des clauses d’une communauté conventionnelle, ainsi que ceux qui peuvent résulter de la confusion du mobilier ou des dettes, ne sont point regardés comme des donations.

Néanmoins, au cas où il y aurait des enfants qui ne seraient pas issus des deux époux, toute convention qui aurait pour conséquence de donner à l’un des époux au-delà de la portion réglée par l’article 1094-1, au titre  » Des donations entre vifs et des testaments « , sera sans effet pour tout l’excédent ; mais les simples bénéfices résultant des travaux communs et des économies faites sur les revenus respectifs quoique inégaux, des deux époux, ne sont pas considérés comme un avantage fait au préjudice des enfants d’un autre lit. »


 
C’est ainsi que seront inefficaces et ne permettront pas de déshériter les enfants du premier mariage :
– Les clauses de communauté conventionnelle qu’elle ait été adoptée par contrat de mariage ou à la suite d’un changement de régime matrimonial homologué:
– Les clauses d’attribution intégrale de la communauté,
– Les clauses de stipulation de parts inégales,
– Les clauses de préciput,
– L’adoption de la communauté de biens meubles et acquêts ou de la communauté universelle en cas d’apports inégaux,
– La clause de prélèvement moyennant une indemnité forfaitaire ou une indemnité évaluée selon une méthode ou une date différente de celle prévue au Code civil (article 1511),
 
Seules les conventions matrimoniales en usufruit permettront de faire échec à l’action en retranchement. En effet, l’article 1094-1 du code civil autorisant via une donation entre époux, de gratifier son conjoint pour 100% de l’usufruit du patrimoine, un avantage matrimonial qui aurait ces mêmes conséquences ne pourrait être remise en question.

Néanmoins, lorsque les revenus du couple sont inégaux, rien n’interdit au couple de se marier sous le régime de la communauté légale afin de faire profiter de l’enrichissement patrimonial, qui trouve son origine dans les revenus supérieurs d’un des époux, à l’autre époux. Ce transfert de patrimoine d’un époux à l’autre grâce aux revenus inégaux est légale et permettra de réduire l’actif de succession (par augmentation du patrimoine du conjoint).

Cet enrichissement du conjoint grâce au revenu peut également être atteint via un PACS (cf »PACS : Comment protéger son conjoint et partenaire ? Quels sont les droits du survivant ?« )

L’acquisition des biens immobiliers en démembrement de propriété entre l’usufruit pour un époux et la nue propriété pour l’autre.

Lorsque les époux sont mariés sous le régime de la séparation ou à l’aide de biens propres pour des époux mariés sous un régime de communauté, il pourrait être envisagé l’acquisition démembrée des biens immobiliers :
– L’un des époux achète l’usufruit du bien immobilier. Le conjoint usufruitier sera celui qui souhaite déshériter ses enfants ;
– L’autre achète la nue propriété du bien immobilier. Le conjoint nu-propriétaire sera celui qu’il convient de protéger ;

Au décès de l’usufruitier, l’usufruit s’éteint et le nu propriétaire devient plein propriétaire dudit bien immobilier en franchise totale de droit de succession. Cette propriété nouvelle sera réalisée en dehors des règles civiles de succession et donc en dehors des règles de la réserve et de la quotité disponible.

La tontine entre époux pour l’acquisition des biens immobiliers

Enfin, et c’est probablement l’une des solutions civiles et fiscales des plus intéressantes, l’acquisition des biens immobiliers avec une clause de tontine permettra au survivant des époux – espérant que ce sera celui qu’il convient de protéger – Cette stratégie suppose que le conjoint pré décédé soit celui qui a des enfants à déshériter -) de devenir seul propriétaire du bien immobilier sans application des règles civiles et fiscales de succession.

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