Lorsque l’on parle gestion de patrimoine et optimisation de la transmission de patrimoine, il y a des dates charnières, des dates qu’il ne faut pas rater pour profiter de l’ensemble des dispositifs fiscaux en vigueur.
Passer cette date ou plutôt cet âge de 70 ans, la transmission de votre patrimoine sera probablement plus onéreuse.
1- La donation d’une entreprise avant les 70 ans du donateur, c’est bénéficier d’un abattement de 75% et d’une réduction de 50% des droits de donation.
On oublie trop souvent ce dispositif fiscal pourtant très intéressant. Au terme de l’article 790 du code général des impôts, les donations en pleine propriété (les donations d’usufruit ou en nue-propriété sont donc exclues) des parts ou actions d’une société ayant une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale et pour lesquels il a été signé un pacte DUTREIL transmission, bénéficient d’une réduction de 50 % sur le montant des droits de succession lorsque le donateur est âgé de moins de soixante-dix ans.
Cette même réduction de droit de donation de 50% est applicable aux donations en pleine propriété de la totalité ou d’une quote-part indivise de l’ensemble des biens meubles et immeubles, corporels ou incorporels, affectés à l’exploitation d’une entreprise individuelle ayant une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale pour laquelle il a été signé un pacte DUTREIL transmission.
Pour mémoire et rappel comme nous vous l’expliquions dans cette visio-patrimoniale « Pacte DUTREIL : Optimisation patrimoniale de la transmission d’entreprise« , le pacte DUTREIL est un dispositif fiscal majeur (et incontournable) lorsque l’on évoque l’anticipation et l’optimisation de la transmission d’une entreprise.
Le pacte DUTREIL permet de bénéficier d’une exonération de 75% de la valeur des titres transmis par donation ou succession. En d’autres mots, en présence d’un pacte DUTREIL, ou engagement collectif de conservation de titres, la valeur de l’entreprise retenue pour le calcul des droits de succession (ou de donation) est égale à 25% de sa valeur.
L’assiette des droits de succession ou de donation est réduite de 75% grâce au pacte DUTREIL.
Cette réduction d’assiette est cumulable avec l’abattement général de 100 000€ renouvelable tous les 15 ans dont bénéficient toutes les transmissions entre ascendants et descendants et cette réduction de droit de donation de 50% lorsque la donation est réalisée avant les 70 ans du donateur en application de l’article 790 du CGI
« Les donations en pleine propriété des parts ou actions d’une société ayant une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale qui réunissent les conditions énumérées à l’article 787 B bénéficient sur les droits liquidés en application des articles 777 et suivants d’une réduction de 50 % lorsque le donateur est âgé de moins de soixante-dix ans »
Article 790 du CGI
Valeur de l’entreprise * 25% – 100 000€ = (Base taxable aux droits de succession * Taux barème des droits de donation / succession) * 50% = Droit de donation à payer par le donataire (celui qui reçoit la donation) ou le donateur (celui qui donne) pour encore davantage optimiser la transmission fiscale de l’entreprise. (Transmission d’entreprise : exonération de 75% de la valeur des titres transmis par donation ou succession)
La transmission des entreprises bénéficie d’un cadre fiscal particulièrement favorable en France.
Synthèse du pacte DUTREIL transmission

2 – Après 71 ans, la donation avec réserve d’usufruit est moins favorable.
Les donations peuvent être réalisées en pleine propriété ou avec réserve d’usufruit.
La donation en nue-propriété avec réserve d’usufruit d’un immeuble, d’un compte titre ou autre, est une solution parfaitement adaptée à de très nombreuses situations familiales et patrimoniales.
Donner la nue-propriété avec réserve d’usufruit, c’est donner tout en conservant l’usufruit de l’immeuble par exemple, c’est-à-dire en conservant le droit d’occuper la maison, ou d’en percevoir les loyers et autres revenus. (cf « Usufruit, Nue-propriété, Quasi-usufruit : Définition, droits et obligations. et Usufruit / Nue-propriété, qui doit payer les travaux immobiliers ?).
Au décès de l’usufruitier, l’usufruit s’éteint et le nu-propriétaire devient plein propriétaire de l’objet de la donation. Cette extinction d’usufruit par le décès n’est jamais taxable. Le nu-propriétaire deviendra plein propriétaire sans avoir de droit de succession à payer.
Lors de la donation de la nue-propriété avec réserve d’usufruit, la valeur de la nue-propriété (c’est-à-dire la valeur fiscale de la donation pour calculer le montant des droits de donation éventuellement à payer) est fonction de l’âge de l’usufruitier.
En effet, être usufruitier, c’est profiter du bien soumis au démembrement de propriété pendant toute sa vie. La durée de cette jouissance est donc fonction de l’espérance de vie de l’usufruitier.
Il est donc assez logique que la valeur de l’usufruit soit fonction de l’espérance de vie et de l’âge de l’usufruitier. C’est l’article 669 du code général des impôts qui fixe la valeur de l’usufruit et de la nue-propriété en fonction de l’âge :
AGE de l’usufruitier | VALEUR de l’usufruit | VALEUR de la nue-propriété |
Moins de : | ||
21 ans révolus | 90 % | 10 % |
31 ans révolus | 80 % | 20 % |
41 ans révolus | 70 % | 30 % |
51 ans révolus | 60 % | 40 % |
61 ans révolus | 50 % | 50 % |
71 ans révolus | 40 % | 60 % |
81 ans révolus | 30 % | 70 % |
91 ans révolus | 20 % | 80 % |
Plus de 91 ans révolus | 10 % | 90 % |
Attention, il ne s’agit que d’un barème fiscal, dont l’utilisation est obligatoire pour la liquidation des droits d’enregistrement (et donc des droits de succession et de donation).
Il ne s’agit pas d’un barème à retenir pour la détermination de la valeur civile de la donation (la valeur civile, c’est la valeur à retenir pour déterminer la valeur de chacune des parts reçues par les héritiers afin d’assurer l’équilibre dans la valeur des biens donnés).
En fonction des qualités intrinsèques des biens donnés (et notamment de leur capacité à générer des revenus complémentaires et donc d’augmenter la valeur de l’usufruit), on comprend aisément que la valeur économique et réelle de l’usufruit peut varier.
À ce titre, nous vous suggérons d’utiliser notre simulateur d’usufruit économique vous permettant de déterminer la valeur civile de la transmission : Simulateur calcul d’usufruit économique. Calculez la valeur réelle de l’usufruit et de la nue-propriété.
Comme vous pouvez le constater dans le barème fiscal de l’article 669 du code général des impôts, la donation en nue-propriété avec réserve d’usufruit avant les 71 ans du donateur (futur usufruitier) est de 60% de la valeur de la pleine propriété alors que la donation après les 71 ans est retenue pour 70% de la valeur en pleine propriété.
Ainsi, l’assiette des droits des donations, avant abattement de 100 000€ applicables aux donations entre ascendants et descendants, augmente de 10% de la valeur en pleine propriété en fonction de l’âge du donateur.
Prenons un exemple concret pour comprendre : Monsieur X, 70 ans, veut faire une donation en nue-propriété avec réserve d’usufruit d’un immeuble valorisé 400 000€ à son fils unique.
S’il réalise cette donation à 70 ans, la valeur fiscale de la donation sera de 400000€ * 60% – 100 000€ = 140000€ valeur de la donation soumise au barème des droits de donation ou de succession.
S’il réalise cette donation après son 71e anniversaire, la valeur fiscale de la donation sera de 400 000€ * 70% – 100 000€ = 180000€ valeur de la donation soumise au barème des droits de donation ou de succession.
Au final, l’assiette des droits de donation augmente de 40000€, soit 8000€ de droit de donation en sus (tranche marginale à 20%).
3 – Après 70 ans, la souscription d’un contrat d’assurance-vie est moins favorable pour transmettre dans des conditions favorables.
Enfin, et c’est probablement la situation la plus connue de tous, la souscription d’un contrat d’assurance vie ou la réalisation d’un versement complémentaire après les 70 ans de l’assuré est nettement moins favorable après les 70 ans de ce dernier.
Vous pourrez consulter notre livre « Assurance vie et gestion de patrimoine » dans lequel nous détaillons toute l’opportunité de la fiscalité de l’assurance vie.
En assurance vie, deux fiscalités sont applicables en cas de décès de l’assuré. Ces fiscalités varient en fonction de la date de souscription du contrat d’assurance vie (notamment pour les contrats souscrit avant le 20 novembre 1991) et l’âge de l’assuré au moment du versement d’une nouvelle prime sur ces contrats (pour les contrats souscrits après le 20 novembre 1991).
La fiscalité n’étant plus autant favorable pour les versements réalisés après les 70 ans de l’assuré, il est indispensable de maximiser les versements avant cette date fatidique. Ça tombe sous le sens, même s’il ne faut pas enterrer l’intérêt fiscal de l’assurance-vie après 70 ans (cf. « L’assurance-vie après 70 ans, une opportunité fiscale à ne pas négliger« )
Synthèse de la fiscalité applicable au dénouement d’un contrat d’assurance vie par le décès du souscripteur assuré.
Primes versées avant le 13/10/1998 | Primes versées depuis le 13/10/1998 | |||
Date de souscription du contrat | Avant 70 ans | Après 70 ans | Avant 70 ans | Après 70 ans |
Avant le 20 novembre 1991 | Pas de taxation | Application d’un abattement de 152.500 € par bénéficiaire puis prélèvements de 20% jusqu’à 700.000 € et 31.25% au-delà (Article 990 I CGI) | ||
Après le 20 novembre 1991 | Pas de taxation | Droits de succession dus sur la fraction des primes versées excédant 30.500 € (les intérêts capitalisés sont exonérés) | Application d’un abattement de 152.500 € par bénéficiaire puis prélèvements de 20% jusqu’à 700.000 € et 31.25% au-delà (Article 990 I CGI) | Droits de succession dus sur la fraction des primes versées excédant 30.500 € (les intérêts capitalisés sont exonérés) |
C’est aussi le moment idéal pour régulariser l’ensemble des contrats d’assurance-vie pour une succession optimale.
Qu’on se le dise clairement : Il ne doit pas y avoir de tabou à clôturer d’anciens contrats d’assurance vie, soit parce qu’ils ne sont plus rentables ou adaptés financièrement (fonds euros poussifs, oubliés par les compagnies d’assurance-vie, option de gestion médiocre, frais ahurissants, Cf cet article : Assurance vie : Faut-il fermer les vieux contrats d’assurance vie peu rentables ?) ou parce qu’ils ne sont plus juridiquement adaptés (notamment depuis la réponse ministérielle CIOT. Cf article : « Réponse ministérielle CIOT : Les conséquences fiscales de l’exonération des contrats d’assurance vie du conjoint« ).
Quitte à revoir ses contrats d’assurance vie, en clôturer certains pour en ouvrir de nouveaux plus adaptés, autant le faire avant vos 70 ans et profiter d’une fiscalité attrayante.