Le démembrement de propriété d’un logement et plus généralement d’un immeuble est une situation courante. Il peut s’agir d’un démembrement volontaire résultant d’une donation avec réserve d’usufruit ou d’un démembrement subi résultant d’une succession en présence d’un conjoint qui aurait choisit l’option héréditaire en usufruit.
Pendant le démembrement de propriété, les propriétaires du logement peuvent devoir prendre la décision de vendre le bien immobilier. Dans une telle situation, l’accord unanime des usufruitiers et des nus propriétaires est requis. L’usufruitier ne peut forcer le nu propriétaire  vendre et inversement. Dans le cadre d’une succession, c’est cette impossibilité à vendre le bien immobilier sans l’accord de l’usufruitier qui nous permet d’affirmer que les enfants ne peuvent pas mettre leur parent survivant ou le conjoint survivant de son logement dont ils sont les nus propriétaires.
En revanche lorsqu’ usufruitier et nu propriétaire sont d’accord pour vendre ledit bien immobilier, la vente d’un bien immobilier démembré ne pose aucun problème particulier. La question est alors du devenir du prix de vente : Comment se répartira le prix de vente entre l’usufruitier et le nu propriétaire ? Qui touchera de l’argent ? Quelle répartition entre l’usufruitier et le nu propriétaire ?
Dans la pratique, une réponse simple (simpliste) est apportée à cette question : Usufruitier et nu propriétaire se partagent le prix de vente et repartent chacun avec un chèque dont le montant est fonction d’une clef de répartition proposée par l’article 669 du CGI. 
Ce partage civil du prix de vente est l’application littérale de la première partie de l’article 621 du code civil ; Le choix d’une répartition en conformité avec l’article 669 du CGI est un choix pratique qui simplifie le travail du notaire (à défaut d’être la meilleure option).
C’est la réponse classique parfois imposée aux vendeurs qui ne savent pas qu’il existe d’autres solutions. En effet, sans ce poser davantage de question, le notaire répartit automatiquement le prix de vente du bien immobilier démembré après application de l’article 669 du CGI et en fonction de l’âge de l’usufruitier :

AGE
de l’usufruitier

VALEUR
de l’usufruit

VALEUR
de la nue-propriété

Moins de :
Moins de : 21 ans révolus

90 %

10 %

Moins de : 31 ans révolus

80 %

20 %

Moins de : 41 ans révolus

70 %

30 %

Moins de : 51 ans révolus

60 %

40 %

Moins de : 61 ans révolus

50 %

50 %

Moins de : 71 ans révolus

40 %

60 %

Moins de : 81 ans révolus

30 %

70 %

Moins de : 91 ans révolus

20 %

80 %

Plus de 91 ans révolus

10 %

90 %

L’application de ce barème fiscal à l’avantage incontestable d’être simple et non remis en question par les parties qui ne savent pas toujours qu’elles peuvent calculer la répartition entre usufruit et nue propriété en passant outre ce barème fiscal.
En effet, en théorie, usufruitier et nu propriétaire peuvent convenir d’une répartition différente que l’on appelle répartition économique davantage en accord avec la valeur réelle de l’usufruit et de la nue propriété. Cette négociation sur la répartition du prix de vente entre l’usufruitier et le nu propriétaire doit intervenir au moment ou ces derniers donnent leur accord pour la vente dudit bien immobilier. Cela est tout à fait pertinent. On ne peut donner un accord sur la vente d’un droit que si l’on connait la valeur de ce que l’on va vendre.
Pour ce faire, les parties peuvent recourir à une estimation mathématique de la valeur de l’usufruit et de la nue propriété. Cette valeur devra être fonction des caractéristiques de l’immeuble vendu et d’hypothèses, telles que l’évolution future des loyers, des charges ou des prix de l’immobilier. Bref, vous l’aurez compris, il s’agit d’une négociation entre usufruitier et nus propriétaires basée sur une formule mathématique incontestable que nous vous présentons dans cet article « Simulateur calcul d’usufruit économique. Calculez la valeur réelle de l’usufruit et de la nue propriété« , ou dans ce simulateur :

Bien évidemment, les parties conscientes de l’importance de hypothèses seront prudentes et devront justifier l’équilibre de ces dernières afin de ne pas prendre le risque d’une requalification fiscale pour donation déguisée.
De surcroît, au delà de ces considérations complexes (et parfois trop théoriques) autour de la question du recours au barème fiscal ou à l’évaluation économique de l’usufruit ou de la nue propriété, le véritable sujet n’est pas là. La question principale me semble être dans la pertinence même de cette répartition : Usufruitiers et nus propriétaires ont ils vraiment intérêt à se partager le prix de vente ? La poursuite du démembrement ne serait elle pas une option plus pertinente ?
 

Faut il vraiment partager le prix de vente démembré entre usufruit et nue propriété ?

L’article 621 du code civil autorise les parties à reporter le démembrement de propriété sur le prix de vente. Ainsi, le partage du prix de vente entre l’usufruitier et le nu propriétaire n’est qu’un choix par défaut que les parties peuvent dépasser en choisissant de reporter le démembrement sur le prix de vente.
C’est alors tout naturellement que le démembrement de propriété pourra se prolonger sur le prix de vente du bien immobilier et se transformer en quasi-usufruit ou être utilisé pour investir dans un niveau bien immobilier qui sera alors démembré. Conserver le démembrement sur le prix de vente est une option très intéressante qui permettra de conserver l’intérêt initial de la donation avec réserve d’usufruit.
L’usufruit initial conservera le droit de jouissance sur la somme d’argent en application de la théorie du quasi-usufruit ou les parties pourront prendre la décision d’investir ensemble le prix de vente dans l’achat d’un nouveau bien démembré. A terme, le décès de l’usufruitier entrainera l’extinction de l’usufruit et le nu propriétaire deviendra plein propriétaire de l’immeuble sans droit de succession sur la valeur de l’usufruit qu’il recueillera à cette occasion.
Mais au delà de cet intérêt fiscal incontestable, c’est surtout la protection des intérêts de l’usufruitier qui est ici amélioré. Au lieu de se retrouver avec seulement 40%, 30% ou même 10% du prix de vente, l’usufruit pourra conserver un droit de jouissance sur un nouvel actif dont il pourra tirer des revenus ou qu’il pourra occuper au titre de sa résidence principale durant toute sa vie.

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