Les époux sont mariés sous le régime de la communauté légale ou sous un régime de communauté conventionnelle, possèdent des biens communs et des biens propres.

Les biens communs sont constitués activement des acquêts faits par les époux ensemble ou séparément durant le mariage, et provenant tant de leurs industries personnelles que des économies faites sur les fruits et les revenus de leurs biens propres.

Ainsi, les biens propres sont constitués de tous les biens qui ne sont pas communs. On parle de présomption de communauté :

En application de l’article 1402 du code civil, tout bien, meuble ou immeuble, est réputé acquêt de communauté si l’on ne prouve qu’il est propre à l’un des époux par application d’une disposition de la loi.

Par opposition aux biens communs, les biens propres sont donc :

  •  – Les biens possédés par les époux avant le mariage ; (Article 1405 du Code civil)
  • – Les biens acquis pendant le mariage, par donation ou succession ; (Article 1405 du code civil)
  • – Mais également, forment des propres par leur nature, quand même ils auraient été acquis pendant le mariage, les vêtements et linges à l’usage personnel de l’un des époux, les actions en réparation d’un dommage corporel ou moral, les créances et pensions incessibles, et, plus généralement, tous les biens qui ont un caractère personnel et tous les droits exclusivement attachés à la personne. (Article 1404 du Code civil)
  • – Et enfin, forment aussi des propres par leur nature, mais sauf récompense s’il y a lieu, les instruments de travail nécessaires à la profession de l’un des époux, à moins qu’ils ne soient l’accessoire d’un fonds de commerce ou d’une exploitation faisant partie de la communauté (article 1404 du Code civil).

Quid de la vente d’un bien propre. Que devient le prix de vente ? Bien commun ou bien propre ?

Tout bien, meuble ou immeuble, est réputé acquêt de communauté si l’on ne prouve qu’il est propre à l’un des époux par application d’une disposition de la loi.

Par opposition, possèdent la qualité de biens propres, les biens dont les époux avaient la propriété ou la possession au jour de la célébration du mariage, ou qu’ils acquièrent, pendant le mariage, par succession, donation ou legs.

Lors de la vente d’un bien immobilier possédant la qualité de bien propre (possédé avant le mariage ou reçu pendant le mariage par succession, donation ou legs), il devient essentiel de conserver la traçabilité de la vente et du réinvestissement. 

Le prix de vente d’un bien propre bénéficie également de la qualification de bien propre. Mais attention à la traçabilité.

Souvenez-vous de l’article 1402 du Code civil cité ci avant : « Tout bien, meuble ou immeuble, est réputé acquêt de communauté si l’on ne prouve qu’il est propre à l’un des époux par application d’une disposition de la loi. »

En effet, dans l’hypothèse où la traçabilité du réinvestissement du prix de vente d’un bien propre n’était pas assurée, l’époux ne pourrait plus retrouver la propriété de ce bien (ou du moins du prix de vente) et devrait donc en partager la propriété avec son époux ou son épouse.

Lorsque les relations matrimoniales sont au beau fixe, le mélange des fonds propres et des fonds communs ne présente pas de difficulté majeure : les époux vivant d’amour et d’eau fraîche ne voudrait pas créer un conflit en évoquant un problème d’argent

Par contre, lorsque l’on sait qu’un mariage sur deux se termine par un divorce, la réflexion devient tout de suite différente et la nécessité de matérialiser l’origine des fonds devient indiscutable.

La clause de remploi, une solution simple pour conserver le caractère propre du produit de la vente d’un bien propre.

La solution nous est donnée, comme toujours par le Code civil dans son article 1434 : « L’emploi ou le remploi est censé fait à l’égard d’un époux toutes les fois que, lors d’une acquisition, il a déclaré qu’elle était faite de deniers propres ou provenus de l’aliénation d’un propre, et pour lui tenir lieu d’emploi ou de remploi. A défaut de cette déclaration dans l’acte, l’emploi ou le remploi n’a lieu que par l’accord des époux, et il ne produit ses effets que dans leurs rapports réciproques.« 

Il suffira d’accompagner l’investissement réalisé avec le produit de la vente du bien propre d’une clause de remploi afin de conférer le caractère propre audit bien. Ainsi, le simple fait de vendre un bien propre et de stipuler, via une clause d’emploi ou de remploi, permet au conjoint de conserver le caractère propre des fonds comme provenant de la vente d’un bien reçu par succession, donation ou Legs ou acquis avant le mariage.

Il ne suffit pas d’acquérir un immeuble avec des deniers propres pour lui conférer la qualité de bien propre, il faut demander le remploi. A défaut de la double déclaration dans l’acte, les fonds devront être considérés comme fonds communs et les époux se partageront la propriété de cet actif.

De même, le simple fait d’investir les fonds issus de la vente d’un bien propre sur un compte bancaire ou compte épargne (livret, compte courant, LDD, assurance vie, contrat de capitalisation) au nom de l’époux, ne suffit pas à conserver le caractère propre des deniers : les fonds ainsi investis seront considérés comme des fonds communs à défaut de clause de remploi.

Il est donc indispensable de rédiger une clause de remploi ou d’emploi qui devra accompagner, au moment de la souscription à la souscription du placement financier ou à l’acquisition immobilier objet du remploi de fonds propres.

Comme nous l’expliquons dans cet article « Succession : Rédiger une clause de remploi a posteriori sur un contrat d’assurance-vie souscrit avec des fonds propres ? », le remploi pourra être réalisé à postériori dans certaines conditions.

Encaissement de fonds propres sur un compte commun : La communauté doit-elle récompense ?

La question de la clause de remploi est essentielle et une jurisprudence confirme que « le profit tiré par la communauté résultant de l’encaissement, au sens de l’article 1433, alinéa 2, du Code civil, des deniers propres d’un époux ne peut être déduit de la seule circonstance que ces deniers ont été versés, au cours du mariage, sur un compte bancaire ouvert au nom de cet époux ». (Cass. 1re civ., 15 févr. 2012, n° 11-10.182).

Un arrêt de la Cour de cassation (Cass. 1e civ. 25-5-2016 no 15-18.573 ), infirme cette position avec ces termes « la communauté doit récompense à l’époux propriétaire toutes les fois qu’elle a tiré profit de biens propres ; il en est ainsi, notamment, lorsqu’elle a encaissé des deniers propres ou provenant de la vente d’un bien propre, sans qu’il en ait été fait emploi ou remploi (C. civ. art. 1433).

Ce fait peut être prouvé par tous moyens. La preuve que la communauté a tiré profit de biens propres peut être administrée par tous les moyens, même par témoignages et présomptions.

La cour d’appel (CA Paris, 27 oct. 2010) a débouté l’époux de ses demandes de récompense au titre de l’encaissement par la communauté de ses fonds propres. Les juges du fond ont jugé que l’ex-époux ne rapportait pas la preuve que la communauté aurait tiré profit des sommes lui appartenant en propre.

En d’autres termes, lorsque l’un des époux dépose des fonds propres sur un compte ouvert à son nom, les fonds perdent leur caractère propre et la communauté ne devra pas récompense à l’époux qui a déposé ses fonds propres sur un compte commun, sauf à démontrer que la communauté a profité de cette somme. La question n’est pas tant l’encaissement de la somme par la communauté, mais il s’agit d’une notion de preuve quant à son utilisation et enrichissement de la communauté.

Est-ce que la communauté s’est enrichie avec l’argent propre de l’un des époux ? ou le couple a t’il dépensé l’argent propre en biens consomptibles tel que des voyages par exemple ?

Il a été jugé que si les deniers propres ont alimenté un compte bancaire ouvert aux noms des deux époux, la preuve de l’encaissement est établie et, en conséquence, le profit tiré par la communauté des fonds propres peut être présumé et ouvrir droit à récompense. Pour s’opposer à celle-ci, il conviendra de démontrer l’emploi ou le réemploi des sommes litigieuses.

À l’inverse, dès lors que les deniers propres ont été versés sur un compte ouvert au nom d’un seul époux, leur encaissement par la communauté n’est pas établi.

Si la Cour de cassation avait déjà eu l’opportunité de préciser que ce n’est pas parce que des sommes sont déposées sur un compte ouvert au nom d’un seul individu qu’elles sont nécessairement propres à celui-ci, elle apporte ici la précision symétrique selon laquelle des sommes versées sur un compte à l’usage du ménage ne profitent pas nécessairement à la communauté.

Bref, tout reste une question de preuve de l’utilisation des fonds.

Dans cette circonstance, rédiger une clause de remploi est INDISPENSABLE et nettement plus sécuritaire.

Le cas spécifique du réinvestissement dans un contrat d’assurance-vie du produit de la vente d’un bien propre.

Depuis la réponse ministérielle Bacquet, puis CIOT, la clause de remploi est indispensable lors de la souscription d’un contrat d’assurance-vie.

En effet, le contrat d’assurance-vie, souscrit par le conjoint survivant, alimenté par des fonds communs, devra être considéré comme un actif de succession pour moitié et partagé entre les héritiers. La clause de remploi permettra donc de faire échec à ces réponses ministérielles Ciot et Bacquet en conférant le caractère propre au contrat d’assurance-vie.

Avant la réponse ministérielle BACQUET et PRORIOL, du 29 Juin 2010, les fonds souscrit dans un contrat d’assurance vie était considérés comme des fonds propres appartenant à l’époux souscripteur en propre et il était parfois difficile de justifier la nécessité de la clause de remploi ou d’emploi (sauf pour l’hypothèse du divorce).

Cette tolérance civile et fiscale est dorénavant sans objet et les fonds investis dans un contrat d’assurance-vie sans clause de remploi, prouvant le caractère propre des fonds, devront être considérés comme appartenant à la communauté. Ce sont des fonds communs.

Cela signifie qu’en cas de décès, les fonds propres, investis sans clause de remploi, sont considérés comme appartenant à la communauté et devront faire l’objet d’un partage avec les héritiers : le conjoint bénéficiaire du prix de vente d’un bien propre ne pourra pas en profiter pleinement et devra en partager la propriété avec les héritiers de son conjoint (dont les enfants d’un autre lit dans le cas de certaines familles recomposées).

Néanmoins, depuis le 01/02/2016 et la réponse ministérielle CIOT, ce partage de propriété avec les héritiers n’est plus le fait générateur de droits de succession. Le conjoint devra partager le contrat d’assurance-vie souscrit à son nom avec les enfants du défunt, mais ces derniers n’auront pas de droits de succession à payer (et cela sans limite de montant, ni d’âge).

Cette situation et ce manque de rigueur dans le réinvestissement des capitaux a pour conséquence de créer une source de difficulté dont on aimerait se passer dans le règlement de la succession, et notamment dans les famille recomposée.

Dès lors que les époux décident ensemble de se marier sous un régime de communauté il semble normal de respecter les règles du contrat de mariage pour souscrire leur contrat d’assurance-vie (cf. « Bien souscrire un contrat d’assurance vie en fonction de son contrat de mariage »).

A suivre.

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